Jésus-Christ est-il Dieu ?
Marcel Kahne
Depuis le début de son histoire,
le Christianisme est mal à l’aise avec la divinité que lui a imposé
le Nouveau Testament avec un Père, un Fils et un Saint-Esprit. On ne
pouvait en faire trois Dieux sous peine de se faire conspuer par les Juifs
fidèles à l’enseignement du Dieu unique de l’Ancien Testament :
« Écoute
Israël ! L’Éternel, notre Dieu, est le seul Éternel » -
Deut. 6:4
« Je suis l’Éternel et il n’y en a
point d’autre, hors moi, il n’y a point de Dieu. » - Esaïe
45:5,6
L’Église Catholique a tenté de résoudre le
problème en donnant à la Divinité une définition philosophique selon
laquelle le Père, le Fils et le Saint Esprit seraient trois Dieux tout en
n’étant qu’un seul Dieu. Une manière de concilier l’Ancien et le
Nouveau Testament dans laquelle le bon sens ne trouve pas son compte.
D’autres ont trouvé une solution bien plus simple qui consiste à
affirmer que le Saint Esprit n’est pas un personnage distinct de Dieu,
mais est simplement une émanation du Père, et que Jésus-Christ n’est
pas un personnage divin. Mais ce sont là des modèles dans lesquels la
Bible refuse tout simplement de s’insérer.
La Bible annonce la couleur dès le début de la Genèse :
« Au commencement, Dieu (Élohim : les Dieux dans le texte en hébreu)
créa les cieux et la terre... Dieu (Élohim : les Dieux) dit :
Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance... Vous serez
comme des dieux, connaissant le bien et le mal... L'Éternel Dieu dit :
Voici, l'homme est devenu comme l’un de nous... » Genèse 1:1, 26 ;
3:5, 22
Le commentateur de Genèse 1:26 de la Bible de Jérusalem
propose cette explication du pluriel Élohim : « Ce pluriel
peut indiquer une délibération de Dieu avec sa cour céleste... ou bien
ce pluriel exprime la majesté et la richesse intérieure de Dieu, dont le
nom commun en hébreu est de forme plurielle. » Il y a cependant une
explication bien plus évidente que la Bible fournit elle-même :
« Au commencement était la Parole, et la
Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. Elle était au
commencement avec Dieu. Tout a été fait par elle, et rien de ce qui a été
fait n’a été fait sans elle... le monde a été fait par elle... »
Jean 1 :1-3, 10
Note : le sens très clair de ce texte est
contesté parce que, dans la première mention, le grec dit :
« le Dieu », tandis que dans la deuxième, l’article manque
(...et la Parole était avec le Dieu, et la Parole était Dieu...). Mais
cet argument est sans valeur, car la suite du texte montre que le grec
utilise indifféremment « theos » avec ou sans article. Ainsi :
verset 2 : « ton theos » ; verset 6 : « theou »
sans article ; verset 12 : « theou » sans article ;
verset 13 : « theou » sans article ; verset 18 :
« theou » sans article ; versets 29, 34, 36, 50, 52 :
« tou theou » avec article.
Mais il y a plus. Jean était un hébreu et, comme
tel, il connaissait bien la pratique d’attribuer une valeur numérique
aux mots (les lettres de l’alphabet on valeur de chiffre en hébreu)
soulignant ainsi le message direct avec un message en filigrane. La valeur
numérique de YHVH est 10+5+6+5 = 26. Parole se dit « dabar »
et sa valeur numérique est 4+2+20=26. La parole est donc Dieu. Dabar
YHVH (parole de Dieu) a pour valeur 26+26= 52, et « Ben » (le
Fils) a également 52 comme valeur (2+50). Le Fils est par conséquent
Dieu, lui aussi. Cette technique appelée gématrie, se remarque dans
divers endroits de la Bible, et ne doit pas être balayée d’un
haussement d’épaules. Il ne faut pas oublier que nous ne pouvons pas
lire un texte vieux de 2000 ans écrit par un oriental selon les
conceptions littéraires de l’époque, comme si c’était un texte
moderne écrit par un occidental, rempli de nos conceptions modernes.
« ...Dieu nous a parlé par le Fils...
Il l'a établi héritier de toutes choses, et c’est par lui qu’il a fait les
mondes... » Hébreux 1 :2
« Mais au Fils il dit : ...Toi,
Seigneur, tu as au commencement
fondé la terre, et les cieux sont l’ouvrage de tes mains » Hébreux 1:8-10
« Car en lui [le Fils de son amour v. 16] tout a été créé dans les cieux et
sur la terre ... Tout a été créé par lui et pour lui. » Col 1 :16
C’est parfaitement clair : le pluriel Élohim de la Genèse désigne
au moins deux Dieux, le Père et le Fils, qui étaient ensembles au
moment de la création, le Père étant à l’origine de l’acte créateur
et le Fils en étant l’exécutant, comme l’exprime très correctement
l’apôtre Paul :
« ... Pour nous il n’y a qu’un seul Dieu,
le Père, de qui viennent toutes choses, et pour qui nous sommes, et un seul
Seigneur, Jésus-Christ, par qui
sont toutes choses et par qui nous sommes. » 1 Cor 8 :6
La Bible est donc formelle pour affirmer que Jésus-Christ
est le Créateur. Mais elle va plus loin : de nombreux passages
attestent que Jésus-Christ est l’Éternel [YHVY, Yahvé, Yahweh, Jéhovah]
de l’Ancien Testament.
Exode 3 :14
Dieu dit à Moïse :
Je suis celui qui suis. Et
il ajouta : c’est ainsi que tu répondras aux Israélites :
Celui qui s’appelle « Je
Suis » m’a envoyé vers vous.
|
Jean
8 :58
Jésus leur dit : En vérité, en vérité,
je vous le dis, avant qu’Abraham fût, moi, je suis. Là -dessus ils prirent des pierres pour les lui jeter.
|
Zacharie
14 :2-4
Je regrouperai toutes les nations à Jérusalem
pour le combat... L’Éternel
sortira... ses pieds se placeront en ce jour-là sur le mont des Oliviers...
|
Actes
1 :9-12
...Il fut élevé
pendant qu’ils le regardaient... Vous Galiléens, pourquoi vous
arrêtez-vous à regarder au ciel ? Ce Jésus, qui a été enlevé
au ciel du milieu de vous,
reviendra de la même manière dont vous l’avez vu aller au
ciel. Alors ils retournèrent à Jérusalem, depuis le mont appelé des Oliviers...
|
Zacharie
12 :10
Alors je [l’Éternel,
v.4] répandrai sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem
un esprit de grâce et de supplication, et ils tourneront les
regards vers moi, celui qu’ils ont transpercé. Ils porteront son deuil
comme on porte le deuil d’un fils
unique, ils pleureront amèrement sur lui, aussi amèrement
qu’un premier né.
|
Jean
19 :37, Apoc. :1 :7
Et ailleurs
l’Écriture dit encore : ils regarderont à celui qu’ils ont transpercé.
Voici qu’il vient avec les nuées. Tout
homme le verra, même ceux qui
l’ont percé, et toutes les tribus de la terre se lamenteront
à son sujet.
|
Esaïe
43 :10, 12 ; 44 :8
C’est vous qui êtes mes témoins, -Oracle de l’Éternel-
|
Actes
1 :8
Vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée, dans la Samarie,
et jusqu’aux extrémités de la terre.
|
Psaumes
91 :2,4
...l’Éternel... te couvrira de ses plumes, tu te réfugieras
sous ses ailes...
|
Mat.
23 :37
Jérusalem, Jérusalem...
combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses
poussins sous ses ailes...
|
Psaumes
45 :7
Ton trône, ô Dieu,
subsiste à toujours et à perpétuité ; le sceptre de ton règne est un sceptre de droiture.
|
Luc
1 :33
[Gabriel parlant du futur Jésus à Marie]
Il régnera sur la maison de Jacob éternellement et son règne n’aura pas de fin.
|
Esaïe
44 :6 ; 48 :12
Ainsi parle l’Éternel, le roi d’Israël,
celui qui le rachète, l’Éternel des armées : je suis le premier et je suis le dernier.
|
Apoc.
1 :8, 18 ; 2 :8 ,22 :12-13, 16
Je [Jésus-Christ,
v.1] suis l’Alpha et l’Oméga,
dit le Seigneur Dieu, celui qui est, qui était, et qui vient, le
Tout-Puissant... Moi je suis
le premier et le dernier, le vivant. J’étais mort, et me
voici vivant aux siècles des siècles...
Voici ce que
dit le premier et le dernier, celui qui est mort et qui est revenu à la
vie... Voici : je viens bientôt... Je suis l’Alpha et
l’Oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin.
|
Esaïe
43 :11
C’est moi, moi qui suis l’Éternel, et hors de moi, il n’y a point de
sauveur.
|
Jean
11 :25 ; 14 :6-9 ; Actes 4 :12
Jésus lui dit :
Moi je suis la résurrection et la vie... Moi je suis le chemin, la
vérité et la vie... celui qui m’a vu, a vu le Père... Le salut
ne se trouve en aucun autre, car il n’y a sous le ciel aucun autre
nom donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés.
|
Il va sans dire que ces parallèles entre l’Ancien
et le Nouveau Testament ne sont pas un simple hasard, mais sont voulus.
Ceux qui ont écrit le Nouveau Testament connaissaient parfaitement les
implications des passages en question et l’on peut en déduire que pour
eux, Jésus-Christ et l’Éternel (YHVH, Yahvé, Jéhovah) ne faisait
qu’un. Mais ce n’est pas tout : Jésus-Christ se proclama Dieu de
manière absolument formelle.
Jésus leur dit : En vérité, en vérité, je vous le dis,
avant qu’Abraham fût, moi je suis (grec : ego eimi :
indicatif présent. La Traduction du monde nouveau, des Témoins de Jéhovah,
falsifie ce texte en mettant : « j’étais »). Là
dessus, ils prirent des pierres pour les lui jeter... Les Juifs ne s’y
sont pas trompés : ils ont reconnu l’allusion à Exode 3 :14 :
« Je suis qui je suis », rendu par les LXX « eimi to on »,
je suis l’Etre, Moi et le Père, nous sommes un. Les Juifs ramassèrent
à nouveau des pierres pour le lapider. Jésus reprit et leur dit :
Je vous ai fait voir beaucoup d’œuvres bonnes venant du Père. Pour
laquelle de ces œuvres me lapidez-vous ? Les Juifs lui répondirent :
Ce n’est point pour une œuvre bonne que nous te lapidons, mais pour un
blasphème, et parce que toi, qui est un homme, tu te fais Dieu. (Jean 10 :30-36)
Mais Jésus leur répondit : Mon Père
travaille jusqu’à présent. Moi aussi je travaille. A cause de cela,
les Juifs cherchaient encore plus à le faire mourir, non seulement parce
qu’il violait le sabbat, mais parce qu’il disait que Dieu était son
propre Père, se faisant ainsi lui-même égal à Dieu. (Jean 5 :18)
D’autres passages sont tout aussi éloquents quant
à l’identité véritable de Jésus-Christ :
Lorsque les gens lui amenèrent un paralytique, Jésus, avant de le guérir,
lui dit : « Tes péchés te sont pardonnés. Les scribes et les
pharisiens se mirent à raisonner et à dire : Qui est celui-ci qui
profère des blasphèmes ? Qui peut pardonner les péchés si ce
n’est Dieu seul ? » (Luc 5 :20-21)
Une autre façon dont Jésus-Christ s’identifie à
l’Éternel, c’est sa façon de dire de lui-même qu’il est l’Époux :
« Les amis de l'Époux peuvent-ils mener deuil tant que l'Époux est
avec eux ? Les jours viendront où l’Époux leur sera enlevé,
et alors ils jeûneront » (Mat. 9 :15 ; Marc 2 :19,
voir aussi la parabole des dix vierges). Cela ne peut que faire penser à
la pratique de l’Éternel de l’Ancien Testament de se considérer
comme l’Époux et Israël comme l’épouse (infidèle). Voir par
exemple, Ezéchiel 16, notamment : « Tu as été la femme adultère,
qui reçoit des étrangers au lieu de son mari. » (v.32)
Enfin au moment de quitter les onze, il leur dit :
« Tout pouvoir m'a été donné dans le ciel et sur la terre »
(Mat. 28 :18). Il est donc tout-puissant.
La prétention de Jésus-Christ à être Dieu ne
fait donc aucun doute. Ce qui est clair aussi, c’est que d’autres
l’ont considéré comme tel :
« Car un enfant nous est né, un fils nous est
donné, et la souveraineté (reposera) sur son épaule ; on
l’appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Père éternel, Prince
de la paix. » (Esaïe 9 :5)
« Une voix [celle de Jean-Baptiste] crie dans
le désert : ouvrez le chemin de l’Éternel, nivelez dans la steppe
une route pour notre Dieu... Dis aux villes de Juda : Voici votre
Dieu ! Voici mon Seigneur, l’Éternel, il vient avec puissance...
Comme un berger, il fera paître son troupeau [Je suis le bon berger dit
le Christ de lui-même], de son bras, il rassemblera des agneaux, et les
portera dans son sein ; il conduira les brebis qui allaitent »
(Esaïe 40 :3, 9-11)
« Voici les jours viennent, -Oracle de l’Éternel-,
où je susciterai à David un germe juste ; il régnera en roi et
prospérera, il pratiquera le droit et la justice dans le pays... Et voici
le nom dont on l’appellera : l’Éternel notre justice » (Jérémie
23 :5-6 ;33 :15-16)
« C’est pourquoi, le Seigneur lui-même vous
donnera un signe, voici que la jeune fille est enceinte, elle enfantera un
fils et lui donnera le nom d’Emmanuel » (Esaïe 7 :14)
Matthieu cite ce passage dans Matt. 1 :23,
ajoutant l’explication : « ce qui se traduit : Dieu avec
nous ». Et d’une manière significative, il termine son Évangile
en mettant dans la bouche du Christ les paroles suivantes : « Et
voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde ».
(Mat. 28 :20)
Lorsque l’incrédule Thomas est enfin obligé de
constater que Jésus est bel et bien ressuscité, il n’hésite pas à
s’exclamer : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jean
20 :28), ce qui montre que c’est bien ce que Jésus lui avait
enseigné avant sa mort et qui se confirme pour lui maintenant d’une
manière qu’il ne peut plus réfuter.
Enfin, ceux qui prétendent qu’en étant
homme, Jésus ne pouvait pas être Dieu, devront expliquer Col. 2 :9
« Car en lui habite corporellement toute la plénitude de la divinité »,
et ceux qui prétendent que Jésus n’existait pas avant sa naissance,
devront expliquer, outre Jean 8 :58, Jean 17 :5 « Et
maintenant, toi, Père, glorifie-moi auprès de toi-même de la gloire que
j'avais auprès de toi, avant que le monde fût. »
|