En 2002, on découvrait un ossuaire contenant les mots
«Jacques, fils de Joseph, frère de Jésus». Laffaire fut qualifiée de faux. Il
semblerait que lon ait été un peu vite en besogne comme le montre ce communiqué
de presse de la Biblical Archaeological Review. Le
procès en contrefaçon de lossuaire de Jacques
WASHINGTON, D.C. (31 octobre 2008) La réputation de
lIsrael Antiquities Authority (IAA) est gravement entamée. Après presque quatre
ans de procès (et ce nest pas fini), 75 témoins et plus de 5000 pages de
témoignage, ce qui a été qualifié de «procès en contrefaçon du siècle» est sur le
point de seffondrer. Le juge israélien qui décidera de laffaire a conseillé
en pleine audience au ministère public denvisager de laisser tomber les poursuites.
Les preuves sont absentes.
Les faits sont rapportés par Matthew Kalman du San
Francisco Chronicle et ont fait ensuite le tour du monde. Il décrit lévaluation du
juge Aharon Farkash comme «un dégonflement humiliant» du procès intenté par le
gouvernement et «une situation très embarrassante
pour lAntiquities
Authority [dIsraël]».
La cible du procès était lossuaire portant la
mention «Jacques, fils de Joseph, frère de Jésus» que la Biblical Archaeology Review
avait porté à la connaissance du monde en 2002 dans un article dAndré Lemaire,
épigraphiste à la Sorbonne. Linscription, disait lacte daccusation,
était une contrefaçon, gravée sur un coffre en pierre authentique que les Juifs
utilisaient il y a 2000 ans pour réensevelir leurs mortsun an après
lensevelissement initial une fois que la chair sétait décomposée et
desséchée.
Le témoin principal du gouvernement était le professeur
Yuval Goren, ancien directeur du département darchéologie de luniversité de
Tel Aviv, qui témoigna que le faussaire avait utilisé une couche factice pour cacher la
preuve de sa contrefaçon. Mais dautres témoins suggérèrent dautres façons
dont cette couche avait pu se former.
Chose plus importante, lors du contre-interrogatoire, Goren
fut forcé de reconnaître quaprès que la police eut enlevé cette couche, il avait
pu voir la patine antique originale dans le mot principal «Jésus». Ce qui ôte tout son
sens au procès.
Il ny a rien détonnant à cela. Lune des
membres du comité de lIAA qui, il y a bien longtemps, avait déclaré que
linscription était une contrefaçon, soi-disant à lunanimité, avait
également écrit à lIAA quelle avait vu cette patine antique originale dans
linscription gravée.
Bien que lIAA ait annoncé que la décision du
comité concernant la contrefaçon était unanime, cela na jamais été le cas.
Plusieurs membres du comité nont exprimé aucune opinion, mais lIAA les a
considérés comme ayant dit «oui». Dautres se sont fiés au standing et à la
réputation du professeur Goren. Un membre du comité qui pensait que linscription
était authentique sest dit «forcé» de changer davis à cause de
lanalyse scientifique du professeur Goren. En bref, le comité, qui ne comptait
aucun non-Israélien, pas même le professeur Lemaire, qui avait à lorigine publié
linscription dans la Biblical Archaeology Review et sétait porté garant de
son authenticité, fut embrigadé dans une décision soi-disant unanime.
Lors du procès, il ny eut pas un seul expert en
écriture sémitique de lépoque pour témoigner que linscription était une
contrefaçon. Il ny eut pas non plus le moindre savant pour confirmer le témoignage
scientifique du professeur Goren
et plusieurs scientifiques témoignèrent du
contraire.
Mais il allait falloir plusieurs années pour prouver que
lempereur était nu. Cest là un exemple pénible de la façon dont le
processus judiciaire peut être manuvré par des bureaucrates sans scrupules.
LIsrael Antiquities Authority déteste le marché des antiquités doù
provient cet ossuaire muni dune inscription. Cest, pense-t-on, ce qui a
motivé les poursuites. Jusquici, presque tous ceux qui ont mentionné publiquement
linscription ont généralement supposé, sur la base de la décision soi-disant
unanime du comité de lIAA et du procès pour contrefaçon en cours, que cette
inscription est une contrefaçon. Maintenant cela na plus de raison dêtre.
Mais laffaire ne finit pas là. Tout ce que le
tribunal peut décider, cest que le ministère public na pas prouvé son
accusation au-delà de tout doute raisonnable. Logiquement, linscription peut
toujours être une contrefaçon. Il nest jamais possible de prouver avec une
certitude de 100% quune inscription est authentique. Théoriquement, il y a toujours
un test de plus qui pourrait révéler que cest une contrefaçon. Même les
inscriptions trouvées dans les fouilles archéologiques professionnelles peuvent être
fausses.
Et il reste une autre question : Le «Jésus» de cette inscription est-il le «Jésus»
que nous connaissons par le Nouveau Testament ? Ces noms de linscription : Jacques
(ou plutôt Jacob ou Yaakov sous sa forme hébraïque), Joseph et Jésus (Yehoshua dans
laraméen de cette inscription) étaient tous les trois très courants chez les
Juifs de lépoque. Les savants discutent déjà du point de savoir si cette
inscription concerne Jésus de Nazareth. Cest là que la discussion doit se
situerpas entre les mains dun comité officiel ou dans un acte
daccusation pénal.
Hershel Shanks est rédacteur de la Biblical
Archaeology Review
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