La véracité de l'Eglise de
Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours est indissolublement liée à
l'authenticité du Livre de Mormon. Ou bien celui-ci est véritablement le
document historique qu'il affirme être, et dans ce cas ni Joseph Smith, ni
personne d'autre, que ce soit au 19e siècle ou de nos jours, n'aurait pu
en être l'auteur, ou bien c'est un faux, et alors il sera inévitablement
démasqué par les progrès des connaissances scientifiques, et l'Eglise se
révélera être une fausse église. Or, depuis une cinquantaine d'années, les
indices en faveur de l'authenticité historique du Livre de Mormon n'ont
cessé de se multiplier au point que quiconque veut mettre le Livre de
Mormon (et l'Eglise) en doute ne peut plus - s'il est intellectuellement
honnête - les ignorer. L'article suivant traite d'un de ces indices.
Qu'est-ce qu'un " Mosiah " ?
John W. Welch
En 1965, John Sawyer publiait un article intitulé "Qu'est-ce qu'un Môšiac?"
Il défend la thèse que le terme mosiah était un vieux terme hébreu, comme
go'el ("rédempteur ou vengeur du sang") ou sedeq ("vainqueur, sauveur").
Ce genre de terme avait, à l'origine, une signification dans la vie et la
culture hébraïques, mais ont fini par être utilisés parmi les titres
qu'ils donnaient à Dieu. Le mot môšiac (prononcé mochia) est un mot propre
à l'hébreu, un "mot qui désigne invariablement un champion de la justice
dans un contexte de controverse, de bataille ou d'oppression."
L'analyse de Sawyer jette une lumière intéressante sur le nom Mosiah dans
le Livre de Mormon. Plusieurs raisons subtiles montrent pourquoi les
Néphites, qui ont continué à parler l'hébreu dans le Nouveau Monde, ont pu
être attirés vers l'utilisation d'un nom ou titre de ce genre.
Apparemment la forme du mot Mosiah est un "participe hiphil" en hébreu. On
le trouve en hébreu dans Deutéronome 22:27 ; 28:29 ; Juges 12:3 ; Psaumes
18:41 ; Esaïe 5:29, des textes qui, selon toute probabilité, se trouvaient
sur les plaques d'airain. Le mot n'a cependant pas été translittéré en
anglais par les traducteurs de la King James, par conséquent Joseph Smith
ne connaissait pas le mot hébreu. Il était néanmoins connu et utilisé
comme nom de personne dans le Livre de Mormon ainsi que par les membres de
la colonie juive d'Éléphantine au 5e siècle av. J.-C.
Le sens-clé du mot môšiac était "sauveur". Les gens qui sont en danger
crient au "môšiac" (Deutéronome 22:27). Après avoir examiné tous les
passages où ce mot apparaît dans la bible hébraïque, Sawyer conclut que le
terme s'appliquait à un type particulier de personne ou de rôle et était
parfois un titre désignant "une fonction ou un poste déterminés". Les
caractéristiques de cette fonction sont les suivantes :
1. Le môšiac est un héros victorieux désigné par Dieu.
2. Il libère un peuple élu de l'oppression, de la controverse et de
l'injustice, après que celui-ci a appelé à l'aide.
3. La délivrance du peuple se réalise habituellement par une fuite ou une
négociation non violentes.
4. Le résultat immédiat de l'arrivée du môšiac est "le fait d'échapper à
l'injustice et le retour à un état de justice ou chacun possède ses biens
légitimes."
5. Sur une échelle plus vaste, "la victoire finale signifie l'arrivée de
môšicim (pluriel, prononcé mochiim) pour régner comme Juges sur Israël."
Le terme a donc aussi eu des connotations judiciaires ou juridiques comme
le mot avocat. Un môšiac donne un refuge à ceux qui sont "à sa main
droite" contre leurs accusateurs au tribunal (Psaumes 17:7).
La dérivation exacte du nom Mosiah dans le Livre de Mormon est inconnue,
mais il semble que ce soit le même mot que môšiac, qui provient de
l'hébreu yašac ("être grand ouvert, libérer, délivrer, sauver,
préserver"). Il est donc très différent du mot hébreu mašiah (oint,
"messie", grec christos). Le mot néphite mosiah pourrait aussi contenir un
élément théophorique (-iah), voulant donc dire "le Seigneur est un môšiac."
Chose intéressante, le terme môšiac s'applique parfaitement aux Mosiah du
Livre de Mormon. Le roi Mosiah 1er est un héros désigné par Dieu qui
délivre le peuple élu de Néphi de guerres et de querelles graves en le
guidant quand il s'enfuit du pays de Néphi (voir Omni 1:12-14). On ne sait
pas s'il s'appelait Mosiah avant de remplir de rôle de môšiac de son
peuple ou s'il a acquis ce titre bien mérité plus tard, peut-être comme
titre royal, mais les deux sont possibles.
Effectivement, les thèmes du salut de Dieu et de la délivrance de son
peuple sont forts dans le livre de Mosiah. Dans ce livre, les môšiac se
succèdent. Alma est un môšiac inspiré de Dieu qui sauve pacifiquement son
peuple du roi Noé et des Lamanites. Zénif essaie de retourner au pays de
Néphi pour reprendre possession des biens légitimes des Néphites.
Malheureusement ses efforts échouent et son petit-fils Limhi finit par
remplir le rôle d'un môšiac en conduisant son peuple dans sa fuite pour
retourner à Zarahemla. A la fin du livre de Mosiah, le règne des juges est
installé, une évolution qui va parfaitement avec un peuple qui, pendant
plus d'un siècle, a été bien servi par des môšicim. Ainsi, le livre de
Mosiah, comme le livre des Juges dans l'Ancien Testament, semble mériter
son nom.
Finalement, le terme hébreu môšiac était aussi utilisé comme titre divin.
Dieu était et est un sauveur de ce genre, qui allait descendre apporter le
salut (voir Mosiah 3:9). Le Livre de Mormon soutient l'idée de Sawyer que
le titre divin môšiac était aussi à sa place dans un contexte culturel. Il
semble conserver les traces d'un usage plus répandu quand il dit que : "la
connaissance d'un Sauveur se répandra parmi toutes les nations, en
d'autres termes, un Sauveur du monde" (1 Néphi 10:4).
En fin de compte, ce terme, en tant que titre divin, était appliqué
exclusivement à Dieu. Comme le dit Esaïe 43:11 : "C'est moi, moi qui suis
l'Eternel, et hors de moi il n'y a point de môšiac." De même, l'ange qui
s'adresse à Benjamin affirme l'œuvre unique du Sauveur, le seul moyen par
lequel l'humanité peut obtenir le salut (voir Mosiah 3:17). Ainsi, à
divers égards, l'usage de ce terme dans le Livre de Mormon est tout à fait
remarquable, significatif et parfaitement en accord avec l'usage hébreu.
Basé sur des recherches de John W. Welch, avril 1989. L'article de
Sawyer dans la revue sur l'Ancien Testament Vetus Testamentum a été
publiée sous forme de réimpression par F.A.R.M.S. en 1989. Tiré de 'Reexploring
the Book of Mormon', pp. 105-107. Traduit et publié avec la permission de
FARMS.
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