LA PARUTION DU LIVRE DE MORMON

par John A. Tvedtnes
Meridian Magazine 19 février 2008

La page de titre du Livre de Mormon nous apprend que l'abrégé des annales néphites fait par Mormon devait « paraître, par le don et le pouvoir de Dieu, pour être interprété… Interprétation par le don de Dieu ». On trouve aussi cette idée dans le témoignage des trois témoins, dans D&A 135:3 et dans la déclaration de Joseph Smith : « Par l'intermédiaire de l'urim et du thummim j'ai traduit les annales par le don et le pouvoir de Dieu » (History of the Church 4:537).

Bien que le Livre de Mormon ait été d'origine divine, il y a eu d'autres facteurs qui ont permis de le faire paraître. L’un d’eux est la façon dont les plaques contenant les annales ont été préservées. Si Mormon avait fait son abrégé sur un support périssable, celui-ci n’aurait sans doute pas survécu aux 1400 années jusqu'au temps de Joseph Smith. Il aurait pu l’écrire sur des plaques de cuivre, de bronze ou d'argent, mais celles-ci se seraient oxydées au cours des siècles, ne laissant qu’un texte fragmentaire.
Au lieu de cela, il a choisi l'or (ou un alliage d'or), qui conserve son éclat après des milliers d'années d'ensevelissement dans la terre. Moroni, fils de Mormon, a soigneusement déposé les plaques dans un coffre en pierre placé sur deux autres pierres et a couvert le coffre d’une pierre beaucoup plus grande qui a protégé la cachette de toute découverte et des effets de la nature [1]. C'est le Seigneur qui a commandé la mise des annales sur plaques (1 Néphi 9:3, 5 ; 19:1, 3 ; 2 Néphi 5:30-32 ; Mormon 8:14).
Un autre facteur évident dans la parution du Livre de Mormon a été l'invention de la presse d’imprimerie par Johannes Gutenberg au milieu du quinzième siècle 1. Avant ce temps-là, les livres étaient copiés à la main, la plupart du temps par des moines dans divers monastères d’Europe, un processus laborieux qui ne rendait les livres accessibles qu’au clergé. Avec l'arrivée de la presse d’imprimerie, les livres ont été rendus accessibles à un public plus large, ce qui a permis une augmentation de l'instruction en latin, langue dans laquelle la Bible, premier livre imprimé par Gutenberg, a été éditée [2].

Moins d'un siècle après l’invention de l'imprimerie, la Réforme protestante était en route, une réforme dont l’un des buts était de rendre la Bible accessible dans les langues locales de l'Europe occidentale. L’instruction et la connaissance de la Bible se répandirent dans les masses au cours des quelques siècles qui suivirent. Bien que l’une et l’autre fussent importantes pour l'acceptation du Livre de Mormon par les lecteurs [3], tant qu’il n'y avait personne pour récupérer et traduire les annales de Mormon, le livre ne pouvait pas devenir connu.

Les Européens apprirent l’existence du Nouveau Monde grâce aux voyages de Christophe Colomb, qui commencèrent en 1492, quelques années à peine après le début de la Réforme. Le mouvement protestant aboutit à la création de l'Église anglicane et de ses diverses ramifications, notamment le mouvement puritain, qui conduisit à la colonisation de la Nouvelle Angleterre au début du dix-septième siècle.

Un phénomène mondial

Les ancêtres de Joseph Smith faisaient partie de ce mouvement et certains participèrent à la guerre d'Indépendance des colonies américaines contre la Grande-Bretagne. La plupart d'entre eux habitaient dans le Massachusetts, mais Joseph Smith, fils, naquit en fait à Sharon, dans le Vermont. Si sa famille était restée dans cette région, il ne serait sans doute jamais entré en possession des plaques d'or que Moroni avait cachées dans une colline située dans l'État de New York. Alors, qu’est-ce qui a amené la famille Smith à New York ?

La réponse à cette question est : un volcan appelé Tambora, situé dans une île dans ce qui est aujourd'hui l'Indonésie. En 1815, le Tambora explosa avec une telle violence qu'elle n'a jamais été surpassée dans les temps modernes, pas même par l'éruption mieux connue de l'île indonésienne de Krakatoa en 1883.

Dix mille personnes furent tuées instantanément à Sumbawa et dans les îles voisines, et 82.000 autres moururent de la famine et des maladies qui s’ensuivirent. Le bruit de l'explosion s’entendit jusqu’à 2500 kilomètres de là dans l'île de Rodriguez.

Tambora éjecta cent cinquante kilomètres cubes (170 milliards de tonnes) de débris volcaniques dans la stratosphère. L’épais nuage de cendre produisit, pendant trois jours, des ténèbres complètes sur des îles situées jusqu'à six cents kilomètres de là. Faisant de nombreuses fois le tour du globe et se joignant aux cendres de l'éruption de 1812 de La Soufrière, dans les Indes occidentales, et de l'éruption de 1814 du mont Mayon dans l'île philippine de Luzon, il causa des couchers de soleil oranges spectaculaires jusqu’en Angleterre, et certaines régions de l'Europe et de l'Amérique du Nord ne connurent pas d’été en 1816.
Il y eut, dans certaines régions de la Nouvelle Angleterre, des chutes de neige jusqu’en juillet et août, et du gel fut enregistré chaque mois depuis juin jusque et y compris septembre. Les récoltes désastreuses eurent comme conséquence des émeutes un peu partout en France et en Angleterre à cause de la famine.

Les Smith, qui vivaient alors à Norwich, dans le Vermont, étaient parmi ceux qui connurent les mauvaises récoltes dues, comme l’écrit Lucy Mack Smith, « à un gel prématuré » qui « a failli causer une famine ». Son mari décida de partir pour l’État de New York et la famille s’installa à proximité de Palmyra, où Joseph, fils, non seulement eut sa Première Vision, mais reçut aussi la visite de l'ange Moroni, de qui il reçut les plaques de l'abrégé fait par Mormon et cachées par Moroni lui-même un millénaire et demi plus tôt.

Traductions et études

Le facteur suivant qui a permis d’apporter le Livre de Mormon aux peuples du monde a été l’œuvre missionnaire. Peu de temps après la publication du livre en 1830, Samuel, frère de Joseph, en emporta des exemplaires pour un voyage missionnaire dans la région du nord-est des États-Unis. Depuis cette époque, les missionnaires ont distribué des exemplaires du Livre de Mormon dans une grande partie du monde.

Ceci a été facilité par un autre facteur encore, le programme de traduction de l'Église rétablie, qui a commencé dans les années 1850 et s’est accéléré dans les années 1970. A la fin de 2007, quelque 100 millions d’exemplaires du Livre de Mormon avaient été imprimées en 94 langues.

Quelque chose qui a attiré l’attention d’un plus grand nombre de personnes sur le Livre de Mormon, ce sont les recherches scientifiques sur le Livre de Mormon. Les premiers chercheurs ont été Thomas Brookbank, B.H. Roberts et Janne Sjodahl, suivis au milieu du XXe siècle par Sidney Sperry, Hugh Nibley et d'autres. De grandes avancées furent faites à partir de 1946 par la Société for Early Historic Archaeology, maintenant poursuivies par la Ancient America Foundation.

Avec la création de la Foundation for Ancient Research and Mormon Studies (FARMS) en 1979, les efforts des chercheurs sont devenus plus coordonnés et plus largement connus, grâce à la publication de nombreux livres et de périodiques tels que le Journal of Book of Mormon Studies.

FARMS est maintenant intégrée au Neal A. Maxwell Institute for Religious Scholarship à l'université Brigham Young. Certaines des recherches de l'institut ont retenu l’attention d'un plus grand nombre de savants en dehors de la communauté des saints des derniers jours [4]. Ces dernières années, certains articles édités par l'institut ont été publiés dans d’autres langues [5].
Le développement des médias électroniques a également contribué à diffuser le message du Livre de Mormon. L'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours a publié dans les années 1980 ses versions numérisées de toutes les Écritures et on les trouvait aussi dans les CD-ROM d'Infobases. Avec l'acquisition d'Infobases par Deseret Book, maison d’édition appartenant à l’Église, elles sont maintenant accessibles dans les kits CD-ROM de GospeLink de cet éditeur.

Un certain nombre de saints des derniers jours ont rendu le texte entier du Livre de Mormon accessible sur leur propre site Internet et il existe maintenant sur le site de l'Église sur http://scriptures.lds.org/en/bm/contents. On peut également commander un exemplaire gratuit du Livre de Mormon imprimé.

Les facteurs énumérés ici (la liste n’est pas forcément complète) ont rendu le Livre de Mormon aisément accessible à la plupart des habitants de la terre. On peut même se le procurer dans des enregistrements audio et en braille (dans certaines langues). Mais il reste un facteur plus important, qui nous ramène au début de nos réflexions, c.-à-d., que le Livre de Mormon nous est parvenu « par le don et le pouvoir de Dieu ».

Assurance divine

Le Témoignage de huit Témoins, publié au début du Livre de Mormon depuis 1830, déclare qu'ils ont manipulé les plaques d’où Joseph Smith a traduit le livre et qu'elles semblaient être anciennes. Ils nous déclarent solennellement : « Nous les avons vues et soupesées, et savons avec certitude que ledit Smith détient les plaques dont nous avons parlé. »

Le Témoignage de trois Témoins diffère de cette déclaration assez terre-à-terre et de cette description physique en affirmant que « un ange de Dieu » leur est apparu et leur a montré les plaques, de sorte que « ils [les caractères] nous ont été montrés par le pouvoir de Dieu et non de l'homme » comme cela a été le cas pour les huit témoins. Ils témoignent en outre : « Nous savons aussi qu'elles [les plaques] ont été traduites par le don et le pouvoir de Dieu, car sa voix nous l'a déclaré; c'est pourquoi nous savons avec certitude que l'œuvre est vraie. »

Alors que les huit pouvaient seulement affirmer que les plaques existaient, les trois ont appris de Dieu lui-même que la traduction avait été divinement effectuée, c.-à-d. qu’ils ont appris que le texte lui-même était vrai.

Joseph ayant rendu les plaques à l'ange, nous devons, nous aussi, nous fier à l'assurance divine que le texte du Livre de Mormon est vrai. Nous le faisons en suivant l’exhortation de Moroni, écrite avant qu'il ne cache les plaques pour de futures générations :

« Et lorsque vous recevrez ces choses, je vous exhorte à demander à Dieu, le Père éternel, au nom du Christ, si ces choses ne sont pas vraies; et si vous demandez d'un cœur sincère, avec une intention réelle, ayant foi au Christ, il vous en manifestera la vérité par le pouvoir du Saint-Esprit. Et par le pouvoir du Saint-Esprit, vous pouvez connaître la vérité de toutes choses » (Moroni 10:4-5).

De même que le Livre de Mormon est venu au jour par le don et le pouvoir de Dieu, c’est par le don et le pouvoir de Dieu que nous pouvons connaître sa véracité.

(1) Pour des études récentes sur l'impression du Livre de Mormon, voir David J. Whittaker, “’That Most Important of All Books,’ A Printing History of the Book of Mormon” et Paul Gutjahr, “The Golden Bible in the Bible’s Golden Age: The Book of Mormon and Antebellum Print Culture”, tous deux dans FARMS Occasional Papers 5 (2007). Voir aussi Larry W. Draper, “Book of Mormon Editions” dans M. Gerald Bradford et Alison Coutts (dir. de publ.), Uncovering the Original Text of the Book of Mormon: History and Findings of the Critical Text Project, Provo, FARMS, 2002.


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[1] On sait maintenant que le fait de cacher des documents dans des grottes ou dans la terre était une pratique antique répandue, comme je le mentionne dans mon livre The Book of Mormon and Other Hidden Books: Out of Darkness Unto Light, Provo, FARMS, 2000. Voir aussi H. Curtis Wright, “Metal Documents in Stone Boxes”, tome 1 de John M. Lundquist et Stephen R. Ricks, dir. de publ., By Study and Also by Faith, Salt Lake City, Deseret et FARMS, 1990.
[2] Quand il a traduit la Bible en latin vers la fin du quatrième et au début du cinquième siècle apr. J.-C., saint Jérôme avait l'intention de rendre la Bible (précédemment accessible en grec et en hébreu) plus généralement accessible à ceux qui savaient lire. A l’époque, aucune des langues européennes occidentales n'était écrite, de sorte que ceux qui étaient instruits ne pouvaient lire qu’en latin.
[3] Les deux furent aussi des facteurs dans le rejet du Livre de Mormon par ceux qui considéraient la Bible comme étant exclusivement la parole de Dieu.
[4] On trouvera une brève histoire de ces recherches dans John A. Tvedtnes, “Scholarship in Mormonism and Mormonism in Scholarship”, affiché sur le site de FAIR à http://www.fairlds.org/FAIR. [Également sur Idumea, « Les experts dans le mormonisme et le mormonisme chez les experts », http://www.idumea.org/Etudes/Critiques/Experts_mormons.htm. Un exemple précis se trouve dans Tvedtnes, “Hebrew Names in the Book of Mormon”, affiché sur le site de FAIR, à http://www.fairlds.org/pubs/HebrewNames.pdf. Cet article a été présenté à l'origine en août 2001 au 13ème Congrès annuel mondial des études juives à Jérusalem.
[5] En plus de ceux qui se trouvent sur le site de l'institut (http://maxwellinstitute.byu.edu/), plusieurs volumes ont paru dans la série allemande F.A.R.M.S. Foundation for Ancient Research and Mormon Studies, Deutschsprachige Ausgabe. On trouvera un site français qui contient beaucoup d’articles de spécialistes sur le Livre de Mormon et d'autres sujets mormons à http://www.idumea.org/Etudes/Etudes.htm