LE SONGE DE L'ARBRE DE VIE DE LEHI: TREMPLIN DE LA PROPHETIE

par Corbin T.Volluz

Journal of Book of Mormon Studies, vol. 2, n° 2, 1993, pp. 14-38
© FARMS


Résumé: Le songe de l'arbre de vie de Léhi est bien connu des saints des derniers jours. Cependant le rapport qu’il peut y avoir entre lui et la vision de Néphi (1 Néphi 11-14) n’est peut être pas aussi bien connu. Cet article examine la thèse que la vision de Néphi est une interprétation prophétique amplifiée du songe de l'arbre de vie de Léhi. Nous traiterons aussi d’une autre interprétation du songe de Léhi, à savoir que c’est un guide vers l’au-delà. Enfin, nous examinerons les liens entre le songe de Léhi, le jardin d'Éden et le temple.

1. Introduction

Dans 1 Néphi 8, Léhi a un songe divin dont l’élément central est l'arbre de vie. Sur les branches de l'arbre poussent des fruits blancs, qui sont délicieux au goût. De la base de l'arbre de vie sort une source d’eau pure. Un chemin étroit et resserré conduit à l’arbre de vie [1]. Tout le long du chemin étroit et resserré, et parallèle à lui, il y a une barre de fer, qui est mise là dans le but de guider les infortunés pèlerins qui sont de temps en temps vaincus par des brouillards de ténèbres pendant qu’ils sont en route pour l’arbre de vie. L’endroit où le chemin et la barre commencent est décrit comme étant un champ vaste et spacieux. Sur ce champ il y a de grandes multitudes de gens, dont beaucoup s’avancent pour se saisir de la barre de fer et commencer à longer le sentier vers l'arbre de vie. Près de l'arbre coule une rivière d'eau souillée (qu’il ne faut pas confondre avec la source d’eau pure qui coule de la base de l'arbre). Au-delà de l'eau souillée, il y a un grand et spacieux édifice, rempli à ras bord de gens portant des vêtements somptueux et faisant des réflexions ironiques et des gestes moqueurs à ceux qui prennent du fruit de l'arbre de vie.

Tout cela est bien connu de la plupart des saints des derniers jours. Si le scénario du songe de l'arbre de vie est bien connu, son interprétation de base ne l’est pas moins :

1) L'arbre de vie représente « l'amour de Dieu » (1 Néphi 11:22, 25), ce qui est aussi le cas de « la source d’eau vive » (1 Néphi 11:25).
2) La barre de fer représente « la parole de Dieu » (1 Néphi 11:25 ; 15:24).
3) Le grand et spacieux édifice représente « l’orgueil du monde » (1 Néphi 11:36 ; 12:18).
4) La rivière d’eau souillée représente « les profondeurs de l'enfer » (1 Néphi 12:16 ; 15:29).
5) Les brouillards de ténèbres représentent « les tentations du diable » (1 Néphi 12:17).

Lorsque l’on assemble tous ces symboles et leur interprétation, le message que l’on en retire habituellement ressemble à celui que l’on trouve dans 1 Néphi 15:24:

« Et je… dis [à Laman et à Lémuel] que [la barre de fer] était la parole de Dieu; et quiconque prêtait l'oreille à la parole de Dieu et s'y tenait fermement ne périrait jamais; et les tentations et les traits enflammés de l'adversaire [c’est-à-dire les brouillards de ténèbres et le grand et spacieux édifice] ne pourraient pas non plus avoir le dessus sur lui au point de l'aveugler pour l'entraîner vers la destruction [c-à-d. la rivière d’eau souillée]. »

L'interprétation habituelle est que ceux qui suivent fidèlement la barre de fer (en lisant les Écritures ou « la parole de Dieu ») goûteront finalement du fruit de l'arbre de vie (c'est-à-dire de l'amour de Dieu). C’est cependant aller un peu vite que de conclure que c'est là la seule Interprétation du songe de l'arbre de vie. Bien qu’elle ait assurément une grande importance dans nos efforts personnels pour retourner en la présence de notre Père céleste, cette interprétation peut n’être qu’un parmi un certain nombre de niveaux de signification que Néphi fait découler des symboles du songe de Léhi [2].

Dans 1 Néphi 11:1-14, on trouve la grande vision panoramique que Néphi a de l’avenir en commençant par la naissance du Sauveur dans cette vie et trouvant son point culminant dans la destruction finale des méchants à sa seconde venue. On a généralement considéré que cette vision n’avait rien à voir avec l’interprétation du songe l'arbre de vie de Léhi, la vision étant considérée comme un supplément accordé à Néphi en plus de l'interprétation du songe. Dans cet article, nous proposons la thèse que tel n’est pas le cas, mais plutôt que la vision panoramique tout entière du futur reçue par Néphi est elle-même une interprétation divine et amplifiée du songe de l'arbre de vie de Léhi. La deuxième partie de cet article va examiner cette thèse.

La troisième partie examinera les indices de ce qu'une autre interprétation du songe de l'arbre de vie permet d’obtenir une description de l’au-delà et de la destinée finale des méchants et des justes. Enfin, dans la quatrième partie, nous examinerons les éléments que l’on peut glaner, dans le songe de l'arbre de vie, de ses rapports avec la nature du jardin d'Éden et le temple.

2. Le songe de l'arbre de vie de Léhi en tant que tremplin de la vision du futur donnée à Néphi

L’interprétation de base du songe de l'arbre de vie révélée à Néphi est une vue panoramique du futur depuis l'avènement du Sauveur dans cette vie jusqu'à la Seconde Venue.

La naissance de Jésus-Christ, son baptême, son ministère et sa crucifixion

La naissance de Jésus-Christ. En guise d’interprétation du symbole de l'arbre de vie, Néphi a une vision de la naissance de Jésus-Christ. L’arbre de vie lui est montré en vision par « l'Esprit du Seigneur » (1 Néphi 11:1, 8). Néphi demande alors à « en connaître l'interprétation » (1 Néphi 11:11). En réponse immédiate à sa demande, il a la vision d’une vierge « belle et blanche » dans « la ville de Nazareth » (1 Néphi 11:13-15). À ce moment-là, « l'Esprit du Seigneur », qui a emmené Néphi au sommet de la montagne et lui a ouvert la vision, disparaît et un ange le remplace pour accompagner Néphi (1 Néphi 11:12-14). Poursuivant la démonstration de l'interprétation de l'arbre de vie, l'ange montre maintenant à Néphi la « condescendance de Dieu. »

Le mot condescendre signifie « renoncer volontairement à sa dignité ou à sa supériorité et se rendre égal à un inférieur. » C'est exactement ce que le guide de Néphi se met en devoir de lui montrer. Néphi voit que la vierge est « ravie dans l'Esprit » et donne par la suite le jour à un enfant que l'ange identifie comme étant « l'Agneau de Dieu, oui, le Fils du Père éternel ! » (1 Néphi. 11:18-21). C’est ainsi qu’est décrite « la condescendance de Dieu » – à savoir que Dieu le Fils, le Créateur de toutes choses sous la direction de son Père, allait de sa propre volonté descendre de la gloire céleste pour prendre un corps mortel de chair et le sang et devenir égal aux membres du genre humain. Telle est l'interprétation de l'arbre de vie que l'ange donne à Néphi [3].

L'interprétation ayant été donnée, l'ange interroge ensuite Néphi sur le point de savoir s'il comprend la signification de l'arbre de vie (1 Néphi 11:21) [4]. Néphi répond : « Oui, c'est l'amour de Dieu, qui se répand dans le cœur des enfants des hommes » (1 Néphi 11:22) [5].

Le baptême de Jésus-Christ. Ensuite, Néphi voit la barre de fer que son père avait vue, « qui conduisait à la source d'eau vive, ou à l'arbre de vie » (1 Néphi 11:25). L’eau vive coule de la base de l'arbre de vie. L’interprétation de base de l’eau vive est qu’il s’agit de la boisson divine qui va de pair avec la nourriture divine (c'est-à-dire, le fruit de l'arbre de vie) pour être donnée à ceux qui parviennent à l’extrémité du chemin étroit et resserré. Cependant l'ange donne ici à Néphi une autre interprétation, une interprétation prophétique. Le symbole de l’eau vive est utilisé pour représenter les eaux du Jourdain dans lesquelles le Christ sera baptisé par Jean-Baptiste. C’est, en effet, exactement ce qui est montré en vision à Néphi immédiatement après qu'il a vu l’eau vive (1 Néphi 11:26-27) [6].

Le ministère et l’expiation de Jésus-Christ. En même temps que le symbole de l’eau vive dont nous venons de parler, Néphi voit aussi la barre de fer que son père a vue, qui « conduisait... à l'arbre de vie » et dont Néphi apprend qu’elle représente « la parole de Dieu » (1 Néphi 11:25).

Dans sa vision, Néphi reçoit alors une interprétation prophétique du symbole de la barre de fer, qui comprend l’histoire du ministère du Christ sur cette terre (1 Néphi 11:28), le choix des douze apôtres (1 Néphi 11:29) et la guérison des malades (1 Néphi 11:31), le tout se terminant par la crucifixion du Sauveur et sa mise à mort pour les péchés du monde (voir 1 Néphi 11:33).

Comme nous l’avons vu plus haut, Néphi apprend que la barre de fer était « la parole de Dieu » (1 Néphi 11:25). Il est significatif, dans ce contexte, qu'un des noms-titres de Jésus-Christ est « la Parole de Dieu » (Jean 1:1, 14). Cela correspond à l’interprétation donnée à Néphi dans laquelle « la barre de fer » ou « la Parole de Dieu » représente le ministère et la mort du Christ, car le Christ était la Parole de Dieu incarnée. Le Christ, en tant que Parole de Dieu, est venu sur la terre non pour faire sa propre volonté mais la volonté de son Père (Jean 6:38), jusque et y compris la souffrance atroce de l'Expiation et de la crucifixion (Matthieu 26:39).

L'apostasie vis-à-vis de l'Église fondée par le Christ. Après avoir vu que « le Fils du Dieu éternel » est « mis à mort pour les péchés du monde », Néphi voit dans sa vision « les multitudes de la terre... rassemblées pour combattre les apôtres de l'Agneau » (1 Néphi 11:34). Néphi voit en outre que cette « multitude... était rassemblée... dans un grand et spacieux édifice » (1 Néphi 11:35). Comme elle est rassemblée dans un « grand et spacieux édifice », il se peut que cette multitude soit une interprétation du symbole du « grand et spacieux édifice » du songe de Léhi [7].

L'ange du Seigneur donne alors à Néphi deux interprétations du « grand et spacieux édifice », une spécifique et une générale. L'interprétation spécifique du « grand et spacieux édifice » est « la maison d’Israël [qui] s’est rassemblée pour combattre les douze apôtres de l'Agneau » (1 Néphi 11:35). D’autre part, l'interprétation générale du « grand et spacieux édifice » est donnée quand Néphi dit que c’est « l’orgueil du monde » (1 Néphi 11:36) [8].

Lors de la première session de la Conférence Générale d’avril 1989, le président Ezra Taft Benson a dit :

« C’est à cause de l’orgueil que le Christ a été crucifié. Les pharisiens étaient furieux parce que Jésus affirmait être le Fils de Dieu, ce qui était une menace à leur position ; c’est pourquoi ils complotèrent sa mort. (Voir Jean 11:53.) » [9]

Nous pouvons facilement imaginer que c’est ce même orgueil, qui avait incité les membres pervers de la maison d'Israël à crucifier l'Agneau, qui les a également incités à combattre ses douze apôtres.

Ensuite, Néphi voit le grand et spacieux édifice tomber, « et sa chute fut extrêmement grande » (1 Néphi 11:36). C’est vraisemblablement une manière figurée d'exprimer la destruction et la dispersion de la maison de l'Israël, qui commence en 70 apr. J.-C., lorsque Jérusalem est détruite par les Romains.

Néphi reçoit ensuite un avertissement prophétique de la part de l'ange :

« C’est ainsi que sera la destruction de toutes les nations, tribus, langues et peuples qui combattront les douze apôtres de l'Agneau » (1 Néphi 11:36).

Comme nous allons le voir, cet avertissement est tout ce qu’il y a de sérieux.

Les trois multitudes : la prophétie des descendants de Néphi

Lorsque 1 Néphi 12 commence, la vision passe des événements du Proche-Orient à ceux de l’Amérique. Le chapitre 12 tout entier traite exclusivement du sort des descendants de Néphi.

Dans le songe de Léhi, il y a trois multitudes ou trois groupes distincts de personnes qui essayent de faire le trajet le long du chemin étroit et resserré jusqu‘à l'arbre de vie, chaque multitude obtenant un degré de succès différent. Ces trois multitudes du songe de Léhi symbolisent la destinée prophétique de la postérité de Néphi telle qu’elle est interprétée dans 1 Néphi 12.

La première multitude. La première multitude est décrite dans le songe de Léhi comme suit :

« Et je [Léhi] vis d’innombrables multitudes de gens, dont beaucoup marchaient résolument afin de parvenir au sentier qui menait à l’arbre à côté duquel je me tenais. Et il arriva qu’ils s’avancèrent et s’engagèrent dans le sentier qui menait à l'arbre. Et il arriva qu’il s’éleva un brouillard de ténèbres; oui, un brouillard de ténèbres extrêmement grand, au point que ceux qui s’étaient engagés dans le sentier perdirent leur chemin, de sorte qu’ils s’éloignèrent et se perdirent » (1 Néphi 8:21-23).

Comme raconté ci-dessus, Léhi voit « d’innombrables multitudes de gens », dont beaucoup avancent résolument. Comme interprétation de ceci, Néphi voit, dans sa vision, « des multitudes de gens » sur la « terre de promission », et ces multitudes sont sa postérité et celle de ses frères (1 Néphi 12:1).

Néphi voit ensuite, parmi sa postérité et celle de ses frères, de grandes batailles et de grandes guerres qui durent de nombreuses générations (1 Néphi 12:2-3). Puis il voit « un brouillard de ténèbres » sur la face de la terre de promission. Ce « brouillard de ténèbres » que voit Néphi est une interprétation et un développement du « brouillard de ténèbres » dont Léhi a vu qu’il causait la destruction de la première multitude de son songe, l’amenant à perdre son chemin de sorte qu’elle s’éloigna et se perdit (voir 1 Néphi 8:23).

Comme interprétation prophétique de cette destruction symbolique de la première multitude de Léhi, Néphi a la vision de la destruction de son peuple qui accompagne la vapeur de ténèbres :

« Je vis des éclairs, et j'entendis des tonnerres et des tremblements de terre, et toutes sortes de bruits tumultueux; et je vis la terre et les rochers, qu’ils se fendaient; et je vis des montagnes, qu’elles s’écroulaient en morceaux; et je vis les plaines de la terre, qu'elles s’ouvraient; et je vis beaucoup de villes, qu’elles étaient englouties; et j’en vis beaucoup, qu’elles étaient brûlées par le feu; et j’en vis beaucoup, qu’elles s’effondraient sur la terre à cause du tremblement de celle-ci » (1 Néphi 12:4).

La deuxième multitude. La deuxième multitude est décrite comme suit dans le songe de Léhi:

« Et il arriva que j’ [Léhi] en vis d’autres marcher résolument, et ils s’avancèrent et se saisirent de l’extrémité de la barre de fer ; et ils marchèrent résolument au travers du brouillard de ténèbres, s’agrippant à la barre de fer jusqu’à s’avancer et manger du fruit de l'arbre » (1 Néphi 8:24).

Cette deuxième multitude peut représenter la partie juste du peuple de Néphi qui ne meurt pas sous les grandes destructions accompagnant le brouillard de ténèbres au moment de la crucifixion du Christ. (Notez que Léhi la voit marcher « résolument au travers du brouillard de ténèbres »). Elle ne meurt pas comme la première multitude, ses frères plus corrompus, mais est épargnée, et Léhi la voit « s’avancer et manger du fruit de l'arbre ».

Ce « [fait de manger] du fruit de l'arbre » représente l’idée que la deuxième multitude obtient « l'amour de Dieu » (1 Néphi 11:22, 25) et intègre cet amour à sa société, ce qui va lui permettre de vivre quelque deux cents ans dans l'état merveilleux et béni décrit en détail dans le livre de 4 Néphi:

« Et il arriva qu’il n’y eut pas de querelles dans le pays, à cause de l'amour de Dieu qui demeurait dans le cœur du peuple » (4 Néphi v. 15)

Cette interprétation de la deuxième multitude est donnée à Néphi dans sa vision quand il voit :

« La vapeur de ténèbres, qu’elle se dissipait de la surface de la terre; et voici, je vis des multitudes qui n'étaient pas tombées à cause des grands et terribles jugements du Seigneur » (1 Néphi 12:5) [10].

Malheureusement, dans le songe de Léhi, la deuxième multitude n’allait pas rester éternellement près de l'arbre de vie. Comme Léhi l’écrit :

« Et lorsqu'ils [la deuxième multitude] eurent mangé du fruit de l'arbre, ils jetèrent les regards autour d'eux comme s'ils étaient honteux. Et je jetai aussi les regards autour de moi et vis, de l'autre côté de la rivière d'eau, un grand et spacieux édifice; et il semblait être en l'air, bien haut au-dessus de la terre. Et il était rempli de gens, jeunes et vieux, hommes et femmes; et leur façon de s'habiller était extrêmement raffinée; et ils paraissaient se moquer et montrer du doigt ceux qui étaient venus manger du fruit. Et après avoir goûté du fruit, ils furent honteux à cause de ceux qui se moquaient d'eux; et ils tombèrent dans des sentiers interdits et se perdirent » (1 Néphi 8:25-28).

Dans sa vision, Néphi voit la signification prophétique qui se trouve derrière les images symboliques du songe de Léhi : « Et il arriva que je vis les multitudes de la terre rassemblées » (1 Néphi 12:13). Alors que le premier rassemblement de multitudes représentait la maison de l'Israël se rassemblant pour combattre les douze apôtres de l'Agneau, ce deuxième rassemblement de multitudes représente la postérité de Néphi et ses frères qui se rassemblent pour leur grande bataille finale, qui aura pour résultat l'annihilation virtuelle de la société néphite (1 Néphi 12:14-15). Une fois de plus, l’expression multitudes rassemblées est utilisée pour interpréter le symbole du grand et spacieux édifice du songe de Léhi.

Ensuite l'ange montre à Néphi trois symboles du songe de Léhi qui, une fois combinés, représentent la destruction du peuple de Néphi :

1) La « source [rivière] d'eau souillée », que l’ange interprète comme étant « les profondeurs de l'enfer » (1 Néphi 12:16). Telle est la destination des descendants de Néphi, qui sont morts dans leur état méchant et rebelle.

2) « Les brouillards de ténèbres », que l’ange interprète comme étant « les tentations du diable, qui aveuglent les yeux et endurcissent le cœur des enfants des hommes, et les entraîne sur de larges routes afin qu’ils périssent et se perdent » (1 Néphi 12:17). Ces tentations sont la force extérieure qui conduit finalement à la destruction des Néphites.

3) « Le grand et spacieux édifice », que l'ange interprète comme étant « les vaines imaginations et l’orgueil des enfants des hommes » (1 Néphi 12:18). Cet orgueil est la force intérieure qui cause la perte des Néphites.

Néphi voit alors en vision l'interprétation des trois symboles ci-dessus appliqués à la destruction de son peuple :

« Je regardai et vis que la postérité de mes frères combattait ma postérité, selon la parole de l'ange; et je vis qu’ à cause de l’orgueil de ma postérité [le grand et spacieux édifice] et des tentations du diable [les brouillards de ténèbres], la postérité de mes frères avait le dessus sur le peuple de ma postérité. (1 Néphi 12:19) [11].

Mais qu’en est-il des gens qui ont survécu à cette bataille cataclysmique ? Le songe de Léhi nous donne une réponse symbolique à cette question et la vision de Néphi propose une interprétation correspondante.

Dans le songe de Léhi, « Ils [la deuxième multitude] tombèrent dans des sentiers interdits et se perdirent » (1 Néphi 8:28). Dans la vision de Néphi, l'ange lui dit :

« Voici, ceux-ci [les survivants de la dernière grande bataille des Néphites] dégénéreront dans l'incrédulité. Et il arriva que je vis qu’après avoir dégénéré dans l'incrédulité, ils devenaient un peuple sombre, et repoussant, et souillé, rempli d’indolence et toutes sortes d'abominations. (1 Néphi 12:22-23)

C’est ainsi qu’est symbolisée et interprétée l'apostasie complète qui allait se produire parmi les descendants de Néphi et de ses frères. Spirituellement parlant, « ils tombèrent dans des sentiers interdits et se perdirent » (1 Néphi 8:28).

La lacune dans le compte rendu du songe de Léhi. Avant de passer à l’examen de la troisième multitude du songe de Léhi et de son interprétation correspondante dans la vision de Néphi, nous devons tout d'abord nous rendre compte que Néphi n’a pas enregistré la totalité du récit du songe de Léhi sur les plaques. À un moment donné entre les deuxième et troisième multitudes, Néphi omet intentionnellement certains détails du songe de Léhi lorsqu’il fait ses annales. Pour le dire comme lui, « Et maintenant moi, Néphi, je ne dis pas toutes les paroles de mon père » (1 Néphi 8:29).

Cette lacune dans le compte rendu du songe de Léhi devient importante quand nous nous rendons compte que, bien que cette partie manque dans le songe lui-même, son interprétation prophétique n’est pas manquante dans la vision de Néphi. En d’autres termes, s’il n'inclut pas cette section du songe de Léhi sur les plaques d'or, Néphi en donne toutefois l’interprétation lorsqu’il écrit sa vision.

Après la lacune dans le songe de Léhi, le récit de ce songe reprend dans 1 Néphi 8:30 avec la troisième multitude (ou groupe de multitudes). Une fois que nous pouvons dégager l'interprétation de cette troisième multitude du songe de Léhi dans la vision de Néphi et l’endroit du compte rendu de la vision de Néphi où elle se trouve, nous pouvons être relativement certains que le texte qui se trouve entre l’interprétation de la deuxième multitude et celle de la troisième multitude est l’interprétation de la partie manquante du songe de Léhi.

Dans le songe de Léhi, on voit la troisième multitude s’avancer sur le chemin menant à l'arbre de vie et beaucoup y restent pour de bon (1 Néphi 8:30). C'est là vraisemblablement une représentation des derniers jours lorsque la postérité de Néphi adoptera de nouveau l'Évangile, qui lui sera apporté par l’intermédiaire des Gentils, et ne s’en éloignera plus jamais pour retomber dans un état d'apostasie. On ne doit pas s’étonner que ce soit exactement l'interprétation prophétique que Néphi donne à cette scène dans sa vision, à partir de 1 Néphi 14.

Il semble donc évident que les événements décrits dans la vision de Néphi comme se produisant entre le temps de la deuxième multitude et celui de la troisième multitude (qui constitue la totalité de 1 Néphi 13) ont été symbolisés d’une façon ou d’une autre dans le songe de Léhi. Mais étant donné son désir « d'être bref dans ce [qu’il écrit] » (voir 1 Néphi 8:30), Néphi ne note pas sur les plaques d’or la manière exacte dans laquelle ils étaient symbolisés dans le songe de Léhi [12].

La troisième multitude. Dans le songe de Léhi, la troisième multitude est décrite comme suit :

« [Léhi] vit d’autres multitudes marcher résolument; et elles vinrent se saisir de l’extrémité de la barre de fer, et elles allèrent résolument de l’avant, se tenant continuellement avec fermeté à la barre de fer, jusqu’à s’avancer, et se laisser choir, et manger du fruit de l'arbre » (1 Néphi 8:30)

Léhi voit une grande polarisation se produire parmi les habitants de la terre, car il ne voit pas seulement des multitudes s’avancer résolument vers l'arbre de vie,

« Il vit aussi d’autres multitudes se diriger en tâtonnant vers ce grand et spacieux édifice... Et grande fut la multitude de ceux qui entrèrent dans cet étrange édifice » (1 Néphi 8:31, 33)

Léhi voit ensuite dans son songe que le sort de la troisième multitude qui s’était avancée résolument et était parvenue à l'arbre de vie était plus heureux que celui des deux multitudes précédentes :

« Et lorsque [les méchants] furent entrés dans cet édifice, ils nous montrèrent du doigt avec mépris, moi et ceux qui mangeaient du fruit; mais nous ne fîmes pas attention à eux » (1 Néphi 8:33)

Le fait que ceux qui sont parvenus à l'arbre de vie ne font pas attention au mépris des méchants nous amène à la conclusion qu'ils ne se sont pas écartés de l'arbre comme leurs prédécesseurs, mais y sont restés en permanence. Ainsi prend fin le songe de Léhi [13].

Dans la vision de Néphi, l'interprétation de la troisième multitude du songe de Léhi se trouve dans 1 Néphi 14:7:

« Car le temps vient, dit l'Agneau de Dieu, où j’accomplirai une œuvre grande et merveilleuse parmi les enfants des hommes, une œuvre qui sera éternelle, soit d'un côté, soit de l’autre, soit qu’elle les convainque d’aller dans la paix et la vie éternelle, soit qu’elle les livre à l’endurcissement de leur cœur et à l’aveuglement de leur esprit, jusqu’à ce qu’ils soient réduits en captivité et aussi à la destruction, à la fois temporellement et spirituellement, selon la captivité du diable dont j’ai parlé. »

Ce verset nous apprend que l'interprétation prophétique de la troisième multitude du songe de Léhi est constituée des personnes, dans les derniers jours, qui sont convaincues « d’aller dans la paix et la vie éternelle ». Elles arrivent jusqu’à « l'arbre de vie », mangent de son fruit et ne s’écartent pas [14].

Comme nous l’avons vu, le reste des gens du songe de Léhi qui ne se rendent pas à l'arbre de vie se rassemblent dans le grand et spacieux édifice. Néphi interprète cela comme voulant dire qu’ils sont réduits en « captivité » et à la « destruction, à la fois temporellement et spirituellement » (1 Néphi 14:7). De même que le songe de Léhi semble décrire une polarisation entre les méchants et les justes à l’époque de la troisième multitude, de même nous voyons décrite dans la vision de Léhi une grande polarisation entre les peuples de la terre – « une œuvre qui sera éternelle, soit d’un côté, soit de l’autre » (1 Néphi 14:7) [15]. Dans les versets suivants, Néphi continue à décrire la polarisation qui se produira dans les derniers jours:

« Et il [l'ange] me dit : « Voici, il n’y que deux Églises ; l’une est l'Église de l'Agneau de Dieu, et l'autre est l'Église du diable ; c’est pourquoi, quiconque n’appartient pas à l'Église de l'Agneau de Dieu appartient à cette grande Église, qui est la mère des abominations; et elle est la prostituée de toute la terre » (1 Néphi 14:10) [16].

Néphi voit alors que le nombre de ceux qui appartiennent à l'Église du diable dépassera de loin celui de l'Église de l'Agneau de Dieu (1 Néphi 14:11-12), la même situation qui a été symbolisée dans le songe de Léhi (1 Néphi 8:33).

Ensuite, Néphi voit « que la grande mère des abominations rassemblait des multitudes sur la surface de toute la terre, parmi toutes les nations des Gentils, pour combattre l'Agneau de Dieu » (1 Néphi 14:13) [17]. À la fin de sa vision, Néphi décrit « le pouvoir de l'Agneau de Dieu » descendre sur l'Église de l'Agneau (1 Néphi 14:14) et « la colère de Dieu » se déverser « sur la grande et abominable Église, de sorte qu’il y eut des guerres et des bruits de guerres parmi toutes les nations et tribus de la terre » (1 Néphi 14:15).

La vision de Néphi, comme le songe de Léhi, laisse le lecteur sur sa faim. Le fait que la vision de Néphi et le songe de Léhi s’arrêtent brusquement de la même façon a tendance à confirmer l'hypothèse que la vision de Néphi est une interprétation du songe de Léhi, jusque et y compris le suspense final. Mais à la fin de la vision de Néphi, nous apprenons la raison de cette interruption prématurée.

Néphi se voit interdire par Dieu d’écrire la fin de la vision. Il a vu plus qu’il ne lui est permis de mettre par écrit. Il voit que l'apôtre Jean serait « établi » pour écrire le reste des choses qui ont été montrées à Néphi, mais qu’il lui a été interdit de mettre dans ses annales (1 Néphi 14:18-28). Ceci n’explique pas seulement la fin abrupte de la vision de Néphi, mais aussi la fin aussi abrupte du songe de Léhi. Il est vraisemblable que, de même que le compte rendu de la vision de Néphi est interrompu parce que c’est Jean qui va raconter la suite, de même le compte rendu du songe de Léhi est interrompu pour la même raison [18].

Il apparaît de ce qui précède que Néphi a reçu l’interprétation du songe de l'arbre de vie de Léhi, interprétation qui lui a été donnée sous la forme d'une vision. Cette interprétation comprenait une prophétie panoramique allant de l’avènement du Sauveur sur cette terre jusqu'aux derniers moments de celle-ci juste avant sa seconde venue en gloire.

On ne peut que rester pantois devant le fait que la liste variée et complexe d'événements décrits dans la vision de Néphi ait découlé des quelques symboles tout simples utilisés dans le songe de l'arbre de vie de Léhi. Mais nous n’en avons pas encore fini, car le songe de Léhi ne symbolise pas seulement des choses qui ont trait à ce monde. Dans la section suivante, nous allons voir comment le scénario de l'arbre de vie se prête à une interprétation d’événements qui arriveront aux méchants et aux justes dans l’au-delà.

3. Le songe de l'arbre de vie de Léhi comme guide vers l’au-delà

Dans la dernière section, nous avons vu comment la vision prophétique donnée à Néphi et rapportée dans 1 Néphi 11-14 a servi d’interprétation divine des éléments symboliques du songe que son père a eu au sujet de l'arbre de vie. Peu après que Néphi a reçu sa grande vision, nous voyons Laman et Lémuel lui demander la signification de la rivière d'eau « que notre père a vue » (1 Néphi 15:26). Néphi se lance dans une nouvelle interprétation des symboles du songe de l'arbre de vie et, ce faisant, enseigne à ses frères aînés l'état des âmes de l’humanité dans l’au-delà. Il dit à propos de la rivière :

« Et je leur dis que l'eau que mon père avait vue était la souillure; et son esprit était tellement absorbé par d'autres choses, qu’il ne vit pas la souillure de l’eau. Et je leur dis que c'était un gouffre affreux, qui séparait les méchants de l'arbre de vie et aussi des saints de Dieu... Et je leur dis que notre père vit aussi que la justice de Dieu séparait également les méchants des justes; et son éclat était semblable à l’éclat d'un feu flamboyant, qui monte vers Dieu pour toujours et à jamais et n’a pas de fin » (1 Néphi 15:27, 29-30).

Ce spectacle d’un gouffre béant séparant les méchants des justes est vraisemblablement une représentation du monde des esprits avant l'expiation et la résurrection de Jésus-Christ. Jusqu'à ce moment-là, il n'y avait pas de contacts entre les deux hémisphères du monde des esprits et aucune prédication de l’Évangile par les justes aux méchants et aux ignorants (D&A 138; Luc 16:19-31). C’est pourquoi, compte tenu de l’époque à laquelle Néphi parlait (entre 600 et 592 av. J.-C.), sa description du monde des esprits était correcte.

Il est tout simple de voir comment cette situation existant dans le monde des esprits est une interprétation tirée du songe de l'arbre de vie de Léhi. La partie juste du peuple est d’un côté de la rivière, les méchants de l'autre. Les justes sont probablement du côté de l'arbre de vie et les méchants du côté du grand et spacieux édifice. C’est en effet ce genre de spectacle que nous voyons dans le songe de Léhi. Mais quand on étend et amplifie les symboles du songe de Léhi, la rivière semble ici ne pas être un simple cours d’eau coulant au niveau du sol, mais est au lieu de cela comme le fleuve Colorado, coupant à travers les abîmes et les gorges du Grand Canyon, de manière à créer un grand gouffre séparant les justes des méchants, qu’aucun des deux groupes ne peut franchir.

Néphi décrit ensuite à ses frères ce qui va se passer le jour du jugement :

« Le jour viendrait où ils seraient jugés selon leurs œuvres, oui, les œuvres qui avaient été faites par le corps temporel durant leurs jours d'épreuve. C’est pourquoi, s'ils mouraient dans leur méchanceté, ils seraient rejetés aussi, quant aux choses qui sont spirituelles, qui sont relatives à la justice; c’est pourquoi, ils seraient amenés à comparaître devant Dieu, pour être jugés selon leurs œuvres » (1 Néphi 15:32-33).

Bien qu’elle ne soit pas mentionnée dans ce texte, il est question d’une « barre » dans plusieurs autres passages d’Écriture relatifs au jour du jugement. Jacob et Moroni parlent tous deux de la « barre agréable de Dieu », devant laquelle toute l'humanité sera jugée (Jacob 6:13; Mro. 10:34). Bien que le mot barre, tel qu’il est utilisé dans ce contexte, ait, de toute évidence, des implications légalistes, il est intéressant de constater que la définition principale du mot barre est « un morceau (de bois ou de métal) droit, plus long que large et ayant des usages divers (par ex. comme… support). » [19] Cette définition de la barre comme étant un morceau de métal allongé correspond à la description de la barre de fer conduisant à l'arbre de vie [20]. Il est par conséquent possible que cette scène de jugement décrite par Néphi soit représentée dans le songe de Léhi par le transport de la multitude des méchants, d’une manière ou d’une autre, de l’autre côté du gouffre pour se tenir devant la barre de fer (la barre du jugement) en même temps que les justes pour être jugés selon leurs œuvres.

La barre (ou barre de fer), est l’endroit où les gens sont jugés. On se souviendra que l'interprétation fondamentale de la barre de fer est « la parole de Dieu » (1 Néphi 11:25). Comme nous l’avons fait remarquer plus haut, une des utilisations scripturaires les plus courantes de l'expression la parole de Dieu est celle d’un nom donné à Jésus-Christ. Par conséquent, le fait d’amener tous les hommes devant la barre de fer (la barre du jugement ou la parole de Dieu) pour être jugés selon leurs œuvres peut symboliser l’affirmation de l’Écriture que le Christ sera le juge de toute l'humanité (Jean 5:22) et que tous seront amenés à se tenir devant lui lors de ce grand jour du jugement pour être jugés selon leurs œuvres, qu’elles soient bonnes ou qu’elles soient mauvaises (Apocalypse 20:12-13).

Néphi décrit ensuite à ses frères le destin des méchants et des justes à la suite du jugement final, tout cela en fonction d’un symbolisme découlant du songe de son père :

« Si leurs œuvres sont souillées, ils doivent nécessairement être souillés; et s'ils sont souillés, il faut nécessairement qu'ils ne puissent pas demeurer dans le royaume de Dieu; s'ils le pouvaient, le royaume de Dieu serait souillé, lui aussi. Mais voici, je vous le dis, le royaume de Dieu n'est pas souillé, et rien d'impur ne peut entrer dans le royaume de Dieu; c'est pourquoi, il doit nécessairement y avoir un lieu de souillure préparé pour ce qui est souillé.

« Et il y a un lieu préparé, oui, cet enfer affreux dont j'ai parlé, et le diable est celui qui le prépare; c'est pourquoi, l'état final de l'âme des hommes est de demeurer dans le royaume de Dieu ou d'être chassée, à cause de cette justice dont j'ai parlé.

« C'est pourquoi, les méchants sont rejetés des justes et aussi de l'arbre de vie dont le fruit est le plus précieux et le plus désirable, par-dessus tous les autres fruits; oui, et c'est le plus grand de tous les dons de Dieu » (1 Néphi 15:33-36).

Nous pouvons déduire de l'interprétation de Néphi que, selon les termes du songe de Léhi, une fois que les méchants sont amenés de l’autre côté du gouffre pour être jugés selon leurs œuvres devant la barre du jugement de Dieu, ils ne sont pas simplement remis là ou ils étaient précédemment de l’autre côté du gouffre, mais sont précipités dans le gouffre lui-même et dans la rivière qui sinue à travers, tandis que les justes restent à l'arbre de vie pour manger éternellement de son fruit [21].

Néphi interprète en outre, on se le rappellera, la rivière d'eau souillée comme étant:

« Une représentation de l’enfer affreux, que l'ange m'avait dit qu’il était préparé pour les méchants... et son éclat était semblable à l’éclat d'un feu flamboyant, qui monte vers Dieu pour toujours et à jamais et n’a pas de fin » (1 Néphi 15:29-30).

Il est possible d'interpréter ce passage comme décrivant la rivière d'eau comme brûlant, d’une certaine manière, comme « un feu flamboyant. » L’emploi d’une eau « brûlante » pour représenter l'enfer n'est pas sans précédent dans les Écritures, puisqu’il est l'équivalent de « l’étang de feu et de soufre » bien connu [22].

Tout d’abord 1 Néphi 15:30 dit que « la justice de Dieu séparait également les méchants des justes. » C'est la justice de Dieu qui empêche les méchants de retourner en sa présence avec les justes. Au commencement, Adam a péché et a été chassé de la présence de Dieu. Nous avons tous péché personnellement et, à cause de cela, nous sommes privés de la gloire de Dieu. Selon les termes utilisés dans le songe de Léhi, nous sommes tous devenus souillés en commettant le péché et nous sommes donc en route pour la rivière d’eau souillée et brûlante qui sera notre demeure éternelle. Il n’y a qu’une autre possibilité donnée par Dieu, c'est l'arbre de vie, qui en vient maintenant à représenter la présence de Dieu lui-même. Et la seule façon de parvenir à l'arbre de vie, c’est le chemin étroit et resserré, le long duquel s’étend la barre de fer. Il n’existe aucune autre manière d’accéder à l’arbre de vie.

On se rappellera qu’au début de la vision de Néphi (1 Néphi 11:26-33), l’interprétation de la « barre de fer » a été donnée comme étant le ministère et l'expiation de Jésus-Christ. Nous pouvons maintenant apprécier plus complètement le symbolisme que contient cette interprétation. De même que la barre de fer est la seule manière par laquelle les multitudes peuvent s'approcher du fruit de l'arbre de vie et l’obtenir, de même l'expiation de Jésus-Christ est la seule manière pour nous de surmonter les effets de la Chute, de recevoir le pardon de nos péchés et de retourner en la présence de Dieu (voir Mosiah 3:17) [23].

Tout d’abord 1 Néphi 15:36 dit que le fruit de l'arbre de vie « est le plus grand de tous les dons de Dieu ». De même, D&A 14:7 déclare : « Et, si tu gardes mes commandements et persévères jusqu’à la fin, tu auras la vie éternelle, don qui est le plus grand de tous les dons de Dieu. » Nous voyons donc que le fait de manger le fruit de l'arbre de vie symbolise vraisemblablement le fait de jouir de la vie éternelle, les deux dons étant décrits comme étant le plus grand des dons de Dieu [24].

4. Le songe de l'arbre de vie de Léhi en tant que schéma du jardin d'Éden

Lorsqu’il décrit à ses frères le fait que les méchants sont séparés de l'arbre de vie, Néphi utilise une expression curieuse : « Et je leur dis que notre père vit aussi que la justice de Dieu séparait également les méchants des justes » (1 Néphi 15:30).

On peut se demander comment une notion aussi abstraite que la « justice » peut agir pour séparer ces deux groupes de gens. Il est possible que la réponse à cette question se trouve dans Alma 42, où la justice de Dieu est contrastée avec la miséricorde du Christ et où l’on nous montre comment, par l'expiation du Sauveur, la justice et la miséricorde sont satisfaites et que ni l’une ni l’autre n’est dépouillée. Alma explique que la justice de Dieu a fonctionné dans l’expulsion d'Adam et Ève du Jardin d'Éden après qu’ils ont mangé du fruit de la connaissance du bien et du mal, étant donné qu'ils avaient transgressé ses ordonnances et n'étaient plus aptes à demeurer en sa présence (Alma 42:14). Alma ajoute :

« Or, nous voyons que l'homme était devenu comme Dieu, connaissant le bien et le mal; et de peur qu’il n’étendît la main et ne prît aussi de l'arbre de vie, et le mangeât, et ne vécût à jamais, le Seigneur Dieu plaça des chérubins et une épée flamboyante, afin qu’il ne mangeât pas du fruit » (Alma 42:3)

Nous voyons donc que ce n'est pas le simple attribut de la justice, à lui seul, qui a accompli la séparation entre les méchants et l'arbre de vie, mais c’est plutôt la justice de Dieu manifestée dans le fait qu’il plaça « des chérubins et une épée flamboyante » pour garder l'arbre de vie (Genèse 3:24; Alma 12:21; 42:2; Moïse 4:31).

Abraham nous apprend que l'arbre de vie était « au milieu du jardin » (Abr. 5:9). Et pourtant, lorsqu’il chasse Adam et Ève du jardin d'Éden, Dieu met les chérubins et l'épée flamboyante non pas au milieu du jardin, comme on pourrait s’y attendre, mais « à l’orient du jardin d’Éden » (Moïse 4:31; Alma 12:21; 42:2; Genèse 3:24). On peut se poser la question de savoir pourquoi Dieu a mis les gardiens de l'arbre de vie dans la partie orientale du jardin alors que l'arbre de vie se trouve au milieu. On pourrait y voir une manière inefficace de garder l'arbre de vie, étant donné qu'un intrus pourrait entrer par le nord, le sud ou l'ouest et manger de son fruit sans rencontrer les gardiens.

Il est possible que la raison pour laquelle le Seigneur a mis les chérubins en Éden du côté de l’orient pour garder l'arbre de vie qui se trouvait au milieu d’Éden est qu'il n’y avait qu’une seule entrée au jardin et qu’elle se trouvait à l’orient.

De tous les récits sur le jardin d’Éden accessibles aux saints des derniers jours, seul celui qui se trouve dans la Bible nous donne un aperçu intéressant. Alors que les autres récits disent simplement que les chérubins furent mis en Éden du côté de l’orient pour « garder l'arbre de vie », la Bible dit qu’ils y ont été mis pour garder « le chemin de l'arbre de vie » (Genèse 3:24). Un « chemin » jusqu’à l'arbre de vie doit mener tout naturellement de l'entrée du côté de l’orient du jardin d'Éden jusqu’à l'arbre lui-même, situé « au milieu du jardin » (Abr 5:9). Il n’est sans doute pas interdit de penser que le chemin dont il est question a pu être un chemin étroit et resserré.

Il semble donc possible que quand Léhi a vu l'arbre de vie dans son songe, ce qu’il voyait en réalité, c’était une représentation de ce même arbre qui existait au milieu du jardin d'Éden et qui continue à exister pour la jouissance future des fidèles dans le paradis de Dieu (Ap 2:7). L'histoire de la terre depuis Adam jusqu’à la scène finale est un grand drame dans lequel Adam et Ève (nous tous, respectivement), après avoir été chassés du jardin d'Éden, perdent l’accès à l'arbre de vie et à la vie éternelle. Ils doivent maintenant trouver le chemin du retour et se faire réadmettre dans le jardin pour pouvoir manger de nouveau du fruit de l'arbre de vie et se saisir de l'immortalité et de l'exaltation. La pièce finit là où elle a commencé – au jardin d'Éden et à l'arbre de vie.

Beaucoup d’érudits membres de l’Église ont avancé l’idée que le jardin d'Éden était le premier temple [25], étant donné que c’est là que Dieu s'est révélé pour la première fois à l'homme. Outre cette ressemblance, le jardin d'Éden a pu posséder un certain nombre d’autres caractéristiques similaires aux temples postérieurs, servant ainsi de grand archétype de la Maison du Seigneur.

Tout d’abord, comme nous l’avons noté ci-dessus, il y a apparemment une espèce de barrière qui entoure le jardin d'Éden, de sorte que personne ne peut y accéder si ce n’est à un endroit déterminé. Bien qu'il puisse y avoir une autre explication, la première idée qui vient à l'esprit est l'existence de murs. Un jardin entouré de murs ne semble pas être hors de question [26].

Deuxièmement, la seule entrée du jardin semble être à l’orient. Il est reconnu depuis longtemps qu’il est de coutume, dans la construction des temples, de situer l’entrée vers l’orient.

Troisièmement, l'entrée du jardin est gardée par des anges qui doivent veiller à ce que rien d’impur ne parvienne à l'arbre de vie. De même, à l’entrée des temples modernes, se trouvent des gardiens qui sont mis là dans le but de veiller à ce que seuls les justes soient autorisés à y entrer.

Quatrièmement, l'arbre de vie, représentant la présence de Dieu et la vie éternelle, se trouve au milieu du jardin d'Éden. Il est de coutume, dans la construction des temples, de mettre la salle céleste, symbole de la présence de Dieu et de l’accession à la vie éternelle, au centre de l’édifice, tout comme le lieu saint et le saint des saints se trouvaient autrefois au centre du complexe du temple [27].

Enfin, de même que l’on doit traverser le chemin qui mène de l'entrée du jardin d'Éden pour arriver à l'arbre de vie, de même celui qui va au temple doit suivre « le chemin » des ordonnances, des serments et des alliances du temple pour parvenir à la salle céleste.

Le fait que le Seigneur a placé des anges (des chérubins) pour garder le chemin de l'arbre de vie peut permettre de mieux comprendre la définition souvent citée de la dotation par Brigham Young:

« Votre dotation consiste à recevoir dans la maison du Seigneur toutes les ordonnances qui vous seront nécessaires, lorsque vous aurez quitté cette vie, pour vous permettre de rentrer dans la présence du Père, en passant devant les anges qui se tiennent en sentinelles, étant capables de leur donner les mots-clefs, les symboles et les signes, qui appartiennent à la Sainte Prêtrise, et d’acquérir votre exaltation éternelle en dépit de la terre et de l’enfer » [28].

Il est concevable que les anges du Seigneur placés comme gardiens de l'arbre de vie après l'expulsion d'Adam et Ève soient les mêmes anges dont Brigham Young nous dit que nous devons passer devant eux pour atteindre notre exaltation éternelle.

Conclusion

Cet article a examiné le songe de l'arbre de vie reçu par Léhi et rapporté dans 1 Néphi 8, avec les interprétations diverses de ce songe contenues dans d'autres passages du Livre de Mormon. Du scénario tout simple de l'arbre de vie, qui compte moins d’une douzaine d’éléments, découlent des interprétations concernant l'histoire du monde depuis l’avènement du Sauveur jusqu’aux derniers jours, le destin des méchants et des justes dans l’au-delà et la stratégie de ce que nous devons faire personnellement pendant que nous traversons cette vie pour nous assurer l’accès à la vie éternelle. En outre, le scénario de l'arbre de vie est chargé d’allusions au temple. Le songe de l'arbre de vie de Léhi mérite donc sa place comme l’une des prophéties symboliques les plus riches, les plus souples et dont la portée est la plus considérable de toutes celles que l’on puisse trouver dans les ouvrages canoniques. C’est un témoin non seulement de la nature prophétique du Livre de Mormon, mais aussi du caractère prophétique de l'homme qui l'a fait paraître dans ces derniers jours.

NOTES

[1] Bien que cela ne soit jamais dit expressément dans le texte, le chemin semble être le seul accès possible à l'arbre de vie et par conséquent au fruit qu'il porte.
[2] On remarquera que c’est cette interprétation que Néphi divulgue à ses deux frères rebelles, Laman et Lémuel, quand ils vont le trouver pour lui demander la signification du songe de leur père (1 Néphi 15:21-24). Il serait raisonnable d’en conclure que le niveau de compréhension que Néphi communique à Laman et à Lémuel était le lait et non la viande de l'interprétation du songe de l'arbre de vie, car il est certain que ces deux incrédules, dépourvus de foi, n'étaient pas spirituellement prêts à recevoir les choses plus profondes de Dieu.
[3] Il ne fait guère de doute que c’est là véritablement l'interprétation de l'arbre de vie, étant donné que cette partie de la vision est donnée en réponse directe à la question de Néphi de connaître l'interprétation de l'arbre (1 Néphi 15:11). On trouvera une confirmation de cette idée dans Jeanette W. Miller, « The Tree of Life, a Personification of Christ », Journal of Book of Mormon Studies 2/1, 1993, p. 93.
Il se peut que ce soit à ce moment-là que Néphi a également appris que cet événement capital de l’avènement du Seigneur dans cette vie aurait lieu six cents ans après la vision qui lui en était donnée. Quoique que cela ne se trouve pas dans cette partie du Livre de Mormon, Néphi fait plus tard allusion à cette perception prophétique supplémentaire et dit qu’elle lui a été donnée par « les paroles de l'ange » (1 Néphi 19:8).
Il semble également vraisemblable que la raison pour laquelle c’est un ange qui accompagne maintenant Néphi plutôt que l'Esprit du Seigneur, c’est que l'Esprit du Seigneur était en réalité le Christ dans son état prémortel. Ayant transporté Néphi au sommet de la montagne et lui ayant donné le début de la vision, l'Esprit du Seigneur disparaît juste avant que Néphi ne voie la naissance du Sauveur. Il se peut que cela ait été fait pour que Néphi se rende compte que l'Esprit du Seigneur était ce même enfant qu’il voit naître dans la vision. Si Néphi avait vu simultanément le Messie prémortel à son côté et le Fils de Dieu naître dans la vision, cela aurait pu provoquer en lui une confusion inutile à ce sujet.
[4] Comme dans d'autres expériences sacrées d'enseignement, le Seigneur, ou son messager, communique d'abord une connaissance, puis pose des questions pour voir à quel point l'étudiant a appris.
[5] Quel rapport y a-t-il entre « l'amour de Dieu » et la naissance du Christ ? L'amour éprouvé par le Fils de Dieu pour l'humanité est le facteur qui a été à l’origine de ce qu’il a condescendu à prendre sur lui la chair et le sang, car ce n’est que de cette façon qu’il pouvait fournir la rançon permettant à l'humanité d’être rachetée des effets de la Chute. « Nous l'aimons, parce qu'il nous a aimés le premier » (1 Jn 4:19).
L'amour de Dieu le Père s’est également manifesté par le fait qu’il a envoyé son Fils naître dans ce monde : « Car Dieu a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jean 3:16).
[6] Les eaux du baptême peuvent être considérées comme « vives », étant donné que l’on doit recevoir l'ordonnance du baptême pour obtenir la vie éternelle (Jean 3:5). Dans la Didaché 7, l’un des premiers écrits chrétiens, il est dit : « Mais en ce qui concerne le baptême, voici comment vous baptiserez. Ayant tout d'abord récité toutes ces choses, baptisez au nom du Père et du Fils et de l'Esprit Saint dans de l'eau vive (courante). »
[7] On verra que chaque fois que l’expression multitudes rassemblées est utilisée dans la vision de Néphi, elle paraît faire allusion au symbole du grand et spacieux édifice du songe de Léhi.
[8] Le grand et spacieux édifice comme représentation de la maison d'Israël rassemblée pour combattre les douze apôtres de l'Agneau n’est que la première de plusieurs interprétations, dans la vision de Néphi, du symbole du grand et spacieux édifice du songe de Léhi. Néanmoins, son interprétation générale comme étant « l’orgueil du monde », s'applique avec autant de force à toutes les interprétations spécifiques ultérieures de ce symbole aussi bien qu’à celle dont il est question ici.
[9] Ezra Taft Benson, « Beware of Pride », Ensign 19, mai 1989, p. 5.
[10] D’autres amplifications et détails concernant la deuxième multitude sont ajoutés dans la vision de Néphi lorsqu’il voit « l'Agneau de Dieu descendre du ciel » (1 Néphi 11:5), le choix par le Christ de douze autres comme disciples parmi la postérité de Néphi (1 Néphi 11:7-10) et le passage de trois générations et de beaucoup de la quatrième génération dans justice (1 Néphi 12:11-12).
[11] Bien que cela ne soit pas explicitement dit dans ce passage, il est sous-entendu que le peuple de Néphi, ayant été détruit dans sa méchanceté, a par conséquent été précipité dans « les profondeurs de l'enfer », symbolisées par la rivière d'eau souillée.
L'ange donne les trois éléments symboliques de la vision de Léhi ainsi que leur interprétation dans l'ordre inverse de l’application de ces symboles à la destruction du peuple de Néphi, et constitue ainsi un chiasme.
A « les profondeurs de l'enfer » (1 Néphi 12:16)
B « les tentations du diable » (1 Néphi 12:17)
C « l’orgueil et les vaines imaginations » (1 Néphi 12:18)
C' « L’orgueil de ma postérité » (1 Néphi 12:19)
B' « Les tentations du diable « (1 Néphi 12:19)
A' Les profondeurs de l'enfer (sous-entendu; 1 Néphi 12:19)
Étant donné qu’il était de coutume chez les Hébreux d’autrefois de mettre l'élément le plus important au centre de la structure chiastique, il apparaît que la vision de Néphi considère « l’orgueil », comme ayant été le principal facteur qui a contribué à la chute des Néphites. D'autres Écritures confirment ce point de vue. Mormon dit : « Voici, l’orgueil de cette nation, ou du peuple néphite, s’est avéré être leur destruction » (Mro. 8:27). Dans une révélation donnée par l’intermédiaire de Joseph Smith, le Seigneur a dit : « Prenez garde à l’orgueil, de peur de devenir comme les Néphites d’autrefois » (D&A 38:39).
[12] Ce serait un exercice intéressant que d’essayer de reconstituer la partie non rapportée du songe de Léhi sur la base de son interprétation dans 1 Néphi 13. Nous ne disposons cependant pas de la place pour une telle tentative dans cet article. Pour le moment, nous allons sauter l’ensemble de 1 Néphi 13 sans autre commentaire et concentrer notre attention sur le début de 1 Néphi 14 pour avoir l'interprétation de la troisième multitude du songe de Léhi.
[13] Bien que cette fin brutale laisse le lecteur sur sa faim, nous apprenons plus tard que tout cela est conforme au plan. En fait, il apparaît que cela n’a peut-être pas véritablement été la fin du songe de Léhi, mais plutôt simplement tout ce que le Seigneur a permis à Néphi d’écrire sur les plaques d'or. Nous en reparlerons plus tard.
[14] L'ange dit à Néphi que, si les Gentils des derniers jours « écoutent l'Agneau de Dieu », et « ne s’endurcissent pas le cœur contre l'Agneau de Dieu, ils seront comptés… dans la maison d'Israël » (1 Néphi 14:1-2). Les Gentils peuvent donc être également inclus dans le nombre des gens d'élite de la troisième multitude pour autant qu'ils se conforment à la même condition qui est imposée aux descendants littéraux de la maison de l'Israël, cette condition étant le repentir (1 Néphi 14:6).
[15] Nous apprenons aussi dans 1 Néphi 14:7, cité ci-dessus, que la cause de cette polarisation extrême dans les derniers jours est « l’œuvre merveilleuse » que le Seigneur accomplira, c'est-à-dire le rétablissement de l'Évangile et le rassemblement de son peuple hors du monde (2 Néphi 29:1-2).
[16] Jacob, frère de Néphi, qui avait apparemment aussi eu un aperçu de cette même vision (voir 2 Néphi 6:9-15; 9:5, 41; 10:3), décrit comme suit la polarisation qui allait se produire : « C’est pourquoi ceux qui combattent Sion, tant Juifs que Gentils, tant esclaves que libres, tant hommes que femmes, périront; car ce sont ceux-là qui sont la prostituée de toute la terre; car ceux qui ne sont pas pour moi sont contre moi, dit notre Dieu » (2 Néphi 10:16).
[17] L’expression « multitudes qui se rassemblent » doit être maintenant familière au lecteur. Il est clair que le grand et spacieux édifice du songe de Léhi remplit encore un autre rôle symbolique, cette fois comme l'Église du diable dans les derniers jours, ou la grande mère des abominations. Suivant le modèle de la première représentation du grand et spacieux édifice (1 Néphi 11:35), elle rassemble maintenant des multitudes pour combattre l'Agneau de Dieu.
[18] Cependant, plus tard, Néphi laisse entrevoir le fait que le destin du grand et spacieux édifice (l'Église du diable dans les derniers jours) est le même que celui du grand et spacieux édifice au midi des temps (la maison d'Israël), c'est-à-dire qu’il « s’écroulera dans la poussière et grande sera sa chute » (1 Néphi 22:14, 23). Pareil destin correspond très bien au symbolisme du grand et spacieux édifice que Léhi a vu dans son songe, étant donné qu'il semblait être en l’air, « bien haut au-dessus de la terre » (1 Néphi 8:26). La position précaire du grand et spacieux édifice symbolise son instabilité d’origine, ainsi que le danger couru par tous ceux qui y entrent. Le sort de l'Église moderne du diable accomplit donc la prophétie faite précédemment par l'ange à Néphi : « C’est ainsi que sera la destruction de toutes les nations, tribus, langues et peuples qui combattront les douze apôtres de l'Agneau » (1 Néphi 11:36).
[19] Merriam-Webster, Webster's Seventh New Collegiate Dictionary, Springfield, MA, Merriam, 1967, p. 69.
[20] En outre, le sens juridique du mot barre vient de « séparation ou balustrade traversant une salle de tribunal pour séparer le public de l'espace occupé par les juges, les avocats, le jury et les autres personnes concernées par le jugement d’un cas. » Le mot barre est également utilisé pour décrire « L’endroit où les détenus se tiennent à leur procès », dans Henry C. Black, Black's Law Dictionary, St. Paul, MN, West, 1968, pp. 187-188.
[21] Le symbolisme de la rivière d'eau « souillée » est habilement rattaché aux « profondeurs de l'enfer », qu’elle représente, et à ceux qui y sont précipités. Une fois que les méchants sont jugés et trouvés « souillés », ils ne peuvent entrer dans le royaume de Dieu (1 Néphi 15:34), mais doivent forcément aller dans un endroit souillé comme eux. Néphi nous apprend qu’un endroit souillé de ce genre a été préparé pour eux et que ce sont les profondeurs de l’enfer, que représente bien la rivière d'eau « souillée ».
Il est possible que Néphi veuille en dire davantage par la notion d'eau « souillée » que le simple le fait qu’elle est boueuse ou sale. Après tout, ce n’est pas trop répugnant d’être aspergé d’eau boueuse. Beaucoup de personnes paient cher justement pour cela en se mettant sur de grands radeaux au milieu des rapides du fleuve Colorado! Le mot traduit par « souillé » a plutôt la connotation supplémentaire de « honteusement choquant, vil ou répréhensible. » Ce caractère honteux supplémentaire de la rivière pourrait être dû à la présence de déjections humaines ou animales. Il est possible que la rivière d'eau souillée ne soit rien d’autre qu'un égout à ciel ouvert. Être précipité dans ce genre de rivière serait effectivement répugnant!
[22] Jacob, frère de Néphi, parle de l’étang de feu et de soufre, en utilisant le même genre de terminologie que Néphi utilise pour décrire la rivière d'eau souillée : « Et selon le pouvoir de la justice, car la justice ne peut se voir opposer un refus, vous devrez vous en aller dans l'étang de feu et de soufre, dont les flammes ne s'éteignent pas, et dont la fumée monte pour toujours et à jamais, étang de feu et de soufre qui est le tourment sans fin » (Jacob 6:10).
[23] Comme nous l’avons vu, le chemin étroit et resserré et la barre de fer qu’il longe représentent l'expiation de Jésus-Christ. Dans ce contexte, on se rappellera que le Sauveur lui-même a déclaré : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi » (Jean 14:6).
[24] Dans le même ordre d’idées, le Seigneur a révélé à Jean le Révélateur : « À celui qui vaincra je donnerai à manger de l'arbre de vie, qui est au milieu du paradis de Dieu » (Apocalypse 2:7).
[25] Donald W. Parry, « The Garden of Eden: Sacred Space, Sanctuary, Temple of God, » Explorations: A Journal for Adventurous Thought 5, été 1987, pp. 83-107; Joseph Fielding McConkie, « The Mystery of Eden », dans Joseph Fielding McConkie et Robert L. Millet, dir. de publ., The Man Adam, Salt Lake City, Bookcraft, 1990, p. 30; Stephen E. Robinson, « The Book of Adam in Judaism and Early Christianity », dans id., p. 145; Roger R. Keller, « Adam: As Understood by Four Men Who Shaped Western Christianity, » dans id.
[26] Selon une légende juive, le serpent, tandis qu’il incitait Ève à manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, « se suspendait au mur entourant le Paradis. » La même légende parle de « la porte du Paradis » qu’Ève ouvre, permettant ainsi au serpent d’entrer. Louis Ginzberg, Legends of the Bible, New York City, Simon and Schuster, 1956, p. 49.
L'idée de la porte est particulièrement intéressante à la lumière du fait que Néphi ajoute plus tard au scénario de l'arbre de vie le détail d'une porte que l’on doit passer pour commencer à se mettre en route sur le chemin qui conduit à l'arbre de vie (2 Néphi 31:17-18).
[27] Toutefois, dans les temples les plus récemment construits, comme les temples de San Diego et de Las Vegas, la salle céleste est située au bout du bâtiment.
[28] John Widtsoe, Discours de Brigham Young, p. 426
(Ndlr) Nous avons cru bien faire en proposant à nos lecteurs le tableau ci-dessous, qui schématise cet article remarquable.