ABRAHAM DANS LES TEXTES EGYPTIENS ANCIENS Par John Gee
© Ensign, juillet 1992, pp. 60-61
Depuis que Joseph Smith a rattaché les fac-similés du livre d'Abraham à l'Abraham de la
Bible, certains se sont demandé si Abraham était jamais mentionné dans les papyrus
égyptiens. L'examen récent de ce dont nous disposons prouve que le nom d'Abraham
apparaît en effet dans les textes égyptiens tardifs.
Bien entendu, accepter le livre d'Abraham, comme accepter toute Écriture, sera toujours
une affaire de foi (voir 3 Néphi 26:6-12) et la seule preuve véritable de
lauthenticité des Écritures ne peut venir que du pouvoir du Saint-Esprit (voir
Moroni 10:3-5 ; D&A 50:17-23). Mais la connaissance déléments externes peut
aider à la recherche de la vérité et un certain nombre de textes égyptiens mentionnent
Abraham. Après avoir accumulé la poussière pendant de nombreuses années dans divers
musées et bibliothèques, plusieurs dentre eux retiennent maintenant l'attention
des savants.
Une scène avec un lit en forme de lion apparaît dans le papyrus de Leyde I 384 (PGM
xii). L'esquisse marque le nom d'Abraham, écrit en grec. (Avec la permission du
Rijksmuseum van Oudheden.)
Il y a des dizaines de mentions dAbraham dans les textes égyptiens dont certains
ont été traditionnellement qualifiés de magiques »[1] bien que beaucoup de savants ne
soient pas certains de savoir comment on fait la distinction entre la magie antique et la
religion [2]. Ces mentions sont en cinq langues, le démotique, le vieux copte, le copte,
le grec et l'hébreu. Nous reprenons ici six des mentions dAbraham, datant au
troisième siècle apr. J.-C., dont la plupart viennent de Thèbes, l'endroit où les
papyrus de Joseph Smith ont été trouvés ; ils ont été acquis à l'origine par
Giovanni d'Anastasi, qui les a vendus à plusieurs musées dEurope.
1. La première mention apparaît dans un chapitre sur la façon de faire une chevalière.
Une des étapes est de « apporter une pierre blanche »et « écrire ce nom dessus
: Abraham, ami de lh[omme]. »[3] (PDMxii 6-20 ; comparer avec Apocalypse 2:17 ;
D&A 130:10-11 ; Abr 3:1.)
2. Le deuxième exemple du nom d'Abraham apparaît dans une description de la façon
demployer un anneau pour obtenir « le succès, la grâce et la victoire ». Au
cours de son invocation, le demandeur dit : « Ô dieu puissant, toi qui surpasses tous
les pouvoirs, je tinvoque, Iao, Sabaoth, Adonai, Élohim, [six autres noms],
Abraham, Isaac, Jacob, [encore 82 noms]. »Les quatre premiers noms sont hébreux et
signifient « Seigneur des armées, mon Seigneur, Dieu. »(PGMxii 270-321.)
3. La troisième mention d'Abraham vient du même papyrus que les deux premières. Elle
est accompagnée d'une image, une scène avec un lit en forme de lion semblable à celle
du fac-similé no. 1 du livre d'Abraham, mais cette image est inversée. Une partie du
texte, un charme d'amour, dit : « QuAbraham qui
je tadjure par
et
incinère une telle, fille dun tel. Écris ces mots et dessine cette image sur un
nouveau papyrus. »Plus loin dans le texte nous lisons : « Je vous adjure, esprits des
morts, [par les pharaons] [4] et le démon Balsamos et le dieu à tête de chacal et les
dieux qui sont avec lui. »(PGMxii 474-495, PDMxii 135-164.)
Quelques explications simposent : « Balsamos »est probablement Baal shammayim
(seigneur des cieux), un vieux dieu phénicien et cananéen dont on croyait quil
avait créé la terre [5]. « Le dieu à tête de chacal »est très vraisemblablement
Anubis, qui officie habituellement dans les scènes à lits en forme de lion, bien qu'on
ne puisse le distinguer de son prêtre, qui porte un masque de chacal sur la tête [6].
Les « dieux qui sont avec lui »pourraient être les fils de Horus, qui sont souvent
représentés sous la forme de jarres contenant les organes internes momifiés des
défunts. (Voir le fac-similé n° 1, notes sur les figures 5 à 8.) Sur ce papyrus, la
personne qui se trouve sur le lit en forme de lion est une femme. L'idée d'incinérer la
femme comme punition au cas où elle ne céderait pas à l'homme qui jette le charme est
une vieille formule égyptienne [7].
Bien que ce papyrus soit éloigné dAbraham, qui a vécu quelques deux millénaires
plus tôt, certains de ses éléments rappellent les trois vierges dont parle Abraham, qui
furent « sacrifiées à cause de leur vertu; elles n'avaient pas voulu se prosterner pour
adorer des dieux de bois ou de pierre; c'est pourquoi elles furent tuées sur cet autel,
et cela se fit à la manière des Égyptiens. »(Abr. 1:11.)
Ces trois premières mentions viennent toutes du même papyrus. La mention de « Abraham,
Isaac, Jacob »nous assure que nous avons affaire à des allusions à l'Abraham biblique.
En outre, les mentions montrent un certain lien entre Abraham et le lit en forme de lion,
bien que la nature exacte du lien soit obscure.
4. La quatrième mention d'Abraham se trouve sur un papyrus contenant beaucoup
dallusions à la religion judéo-chrétienne ; le même scribe qui a copié le
papyrus précédent a copié celui-ci aussi. Un long chapitre sur lutilisation
dune lampe pour obtenir la révélation dit à lintéressé de sécrier
: « Ô Khopr-Khopri-Khopr, Abraham, pupille de lil oudjat, quatre fois Qmr 8,
créateur de la bouche, qui as créé la création, la grande création verdoyante.
»(PDMxiv 228-229.) Le nom Khopr-Khopri-Khopr est une invocation au créateur et a des
parallèles dans des textes égyptiens plus anciens [9] et est probablement lié au
fac-similé n° 2, figure 3. Qmr semble signifier quelque chose comme « créateur,
création, plus puissant ou quelquun qui a le pouvoir sur. »Ici, « il est très
remarquable que le patriarche Abraham soit appelé la pupille de lil
oudjat. [10] »La pupille signifie ici « liris et la pupille »de l'il
[11]. Lil oudjat était un symbole de perfection, de prospérité, de
conservation, d'intégrité, d'accomplissement, de santé et de résurrection ; à
lépoque chrétienne, c'était le mot que les Coptes utilisaient pour le salut. Il
apparaît quatre fois dans le fac-similé n° 2 du livre d'Abraham (deux fois dans la
figure 3 et une fois dans les figures 5 et 7).
Lil oudjat est souvent mentionné dans un groupe de chapitres étroitement
apparentés du Livre des Morts égyptien (pp. 162-167) [12] qui traite du thème de la
préservation des morts jusqu'au moment de la résurrection. Lun des points traités
dans cet ensemble de chapitres est lhypocéphale, la catégorie de documents
auxquels le fac-similé n° 2 appartient. Il y a aussi dautres liens entre le
chapitre de ce papyrus « magique »et le fac-similé n° 2 [13].
5. La cinquième mention du nom d'Abraham se rattache à une histoire biblique. (Voir
Genèse, chapitre 19.) Le chapitre du papyrus place cette mention dans un charme d'amour
(comme le troisième exemple, ci-dessus) : « Les cieux souvrirent et les anges de
Dieu descendirent et détruisirent les cinq villes : Sodome et Gomorrhe, Adma et Tseboïm
et Tsoar. Quand une femme entendit le bruit, elle devint une statue de sel. »La personne
qui utilise ce charme invoque également « le grand Michael, Souriel, Gabriel
Istrael [sic], [et] Abraham. »(PGMxxxvi 295-310.)
6. Dans une sixième mention dAbraham dans les papyrus, le demandeur sécrie :
« Je tinvoque, créateur de la terre et des os et de toute la chair et de tous les
esprits et celui qui se tient sur la mer et secoue le ciel, qui a séparé la lumière des
ténèbres [comparer avec Genèse 1:4 ; Moïse 2:4 ; Abr. 4:4], Ô grand esprit,
administrateur légitime de l'univers [voir l'explication du fac-similé n° 2, notes sur
les figures 1, 3 et 7], il éternel, daimon des daimons [14], un dieu des dieux,
seigneur des esprits [comparer avec Abr. 3:22-23], planète fixe [15] [comparer avec
l'explication du fac-similé n° 2, notes sur la figure 5], Jéhovah [comparer avec Abr.
1:16], entends ma voix.
« Tu ne peux pas mal comprendre ma voix en hébreu : [beaucoup de mots étrangers] Béni
est mon Seigneur, le Dieu d'Abraham. Je babille dans une langue étrangère. »Ici le
demandeur se met à parler en hébreu, bien que le texte reste en caractères grecs.
Ce sont là quelques-unes parmi les deux douzaines de mentions dAbraham trouvées
dans des textes d'Égypte. Tous ont été découverts après que Joseph Smith a traduit le
livre d'Abraham. Beaucoup de travail reste à effectuer avant que ces textes et leurs
implications soient entièrement analysés et compris.
Bien quils ne nous disent rien de direct sur Abraham, ces textes nous apprennent
qu'il y avait des traditions sur Abraham qui circulaient dans lÉgypte romaine. Nous
devons nous rappeler que les traditions découlent souvent de vérités plus anciennes :
« On ne peut pas considérer que les documents plus anciens doivent être préférés aux
documents plus tardifs ou que le fait de dater un document prononce un verdict sur l'âge
et la valeur historique de son contenu. Le verdict doit résider dans chacune des
traditions étudiées pour elles-mêmes [16]. »Même si nous avions un manuscrit en
égyptien pour le livre d'Abraham, datant du temps d'Abraham, les détracteurs
n'accepteraient pas le livre d'Abraham pour autant. Ceux qui cherchent à connaître la
vérité du livre d'Abraham devront se fier au Seigneur.
[photo, illustration] Quand il représentait le dieu Anubis, le prêtre portait un masque
comme celui-ci. (Avec la permission du musée Roemer-Pelizaeus, Hildesheim.) Détail de la
chambre du sud d'Osiris, n° 1, à Dendérah
[photo] Avec la permission du Rijksmuseum van Oudheden
[illustration] Lil oudjat apparaît quatre fois dans le fac-similé n° 2 dans
la Perle de Grand Prix.
NOTES
1. Les textes pour cet article viennent des sources suivantes : Karl Preisendanz, Papyri
Graecae Magicae, 2 vols, Leipzig, Teubner, 1928-1931, ci-après dénommé PGM ; F. L.
Griffith et Herbert Thompson, The Demotic Magical Papyrus of London and Leiden, 3 vols.,
Londres, H. Grevel, 1905, ci-après dénommé PDM xiv ; et Janet H. Johnson, « The
Demotic Magical Spells of Leiden I 384 », Oudheidkundige mededelingen uit het rijksmuseum
van oudheden te Leiden 56 (1975), pp. 29-64, ci-après dénommé PDMxii. On trouvera les
traductions dans Hans Dieter Betz, dir. de publ., The Greek Magical Papyri in Translation,
Chicago, University of Chicago Press, 1986.
2. David E. Aune, « Magic in Early Christianity », Aufsteig und Niedergang der
römischen Weltmagie, Berlin, Walter de Gruyter, 1980), II.23.2:1510-1516. Certains
savants pensent quil faut laisser tomber le terme « magie »en faveur de «
religion »; voir Reinhold Merkelbach et Maria Totti, Abrasax: Ausgewählte Papyri
religiösen und magischen Inhalts, vol. 17, band 1 de Papyrologica Coloniensia, Opladen
West-deutscher Verlag, 1990, p. 1 ; Stephen D. Ricks, « The Magician as Outsider: The
Evidence the Hebrew Bible »dans Paul V.M. Flesher, New Perspectives on Ancient Judaism,
vol. 5, Lanham, MD, University Press of America, 1990, 125-134.
3. La restauration est le mot grec philen[or].
4. Neukoi peut se rapporter aux morts en général ou spécifiquement à certains pharaons
morts. Voir Manethon, Aegyptiaca, fragments 2.2, 7a.
5. Voir Harold W. Attridge et Robert A. Oden, Jr., Philo of Byblos: The Phoenecian
History, Washington, D.C.: Catholic Biblical Association of America, 1981, 40; 81 n. 49.
6. Christine Seeber, Maske, Lexikon der Ägyptologie, 7 vols., Wiesbaden,
Harrassowitz, 1977-1989), 3:1196-1199.
7. Voir J. F. Borghouts, Ancient Egyptian Magical Texts (Leiden, Brill, 1978), p. 1; Paul
Smither, A Rammesside Love Charm, Journal of Egyptian Archaeology 27, 1941,
pp. 131-132.
8. Voir à ce sujet Robert K. Ritner, Hermes Pentamegistos, Göttinger
Miszellen 49, 1981 pp. 73-75.
9. Voir le Papyrus Bremner-Rhind 28.20-21, dans Raymond O. Faulkner, The Papyrus
Bremner-Rhind (British Museum n° 10188), vol. 3 de Bibliotheca Aegyptiaca, Bruxelles,
Fondation Égyptologique Reine Élisabeth, 1933, p. 69.
10. Theodor Hopfner, Der Religions-geschichtliche Gehalt des grossen demotischen
Zauberpapyrus, Archiv Orientalní 7, 1935, p. 118.
11. Hildegard von Deines et Wolfhart Westendorf, Wörterbuch der medizinischen Texte, 2
vols., vol. VII/2 de Grundriss der Medizin der Alten Ägypter, Berlin, Akademie, 1962,
2:1004.
12. Voir Jean Yoyotte, Contribution à lhistoire du chapitre 162 du Livre des
morts, Revue dÉgyptologie 29, 1977, pp. 194-202.
13. Par exemple, comparez le papyrus Leyde I 383, VI.25 avec le Livre des Morts, p. 162 ;
Leyde I 383, VI.35 avec le Livre des Morts p. 164 (le mythe est détaillé dans le livre
de la vache) ; Leyde I 383, VII.30 avec le fac-similé No. 2, figure 6, et le Livre des
Morts, p. 162 ; voir également Marie-Louise Ryhiner, « A Propos de trigrammes
panthéistes », Revue d'Égyptologie 29, 1977, pp. 125-137.
14. Daimon dans le sens du daïmôn de Socrate dans lApologie de Platon 31D.
Cest la divinité personnelle qui guide lindividu ; voir également Walter
Burkert, Greek Religion, tr. John Raffan, Cambridge, Mass., Harvard University Press,
1985, pp. 179-181; James Riddell, The Apology of Plato, Oxford, Clarendon, 1867, pp.
101-109.
15. Pour aïôn, monde, dans le sens de planète, voir Irénée, Contra
Haereses I.30; II.17.5; et A. J. Welburn, Reconstructing the Ophite Diagram,
Novum Testamentum 23/3, 1981, pp. 262-265; il se peut que cela remonte à Planton, Timée
38B-E.
16. John Bright, A History of Israel, 3e éd., Philadelphia, Westminster, 1981, p. 70.
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