Un autre récit de la façon dont Mary Whitmer a vu les plaques d’or
Royal Skousen
Interpreter: A Journal of Mormon Scripture 10, 2014, p. 35-44

Carl T. Cox m’a aimablement fourni un nouveau document racontant comment Moroni a montré les plaques du Livre de Mormon à Mary Whitmer (1778-1856), épouse de Peter Whitmer, père. Mary était la mère de cinq enfants qui ont été témoins des plaques d’or : David Whitmer, l’un des trois témoins ; et Christian Whitmer, Jacob Whitmer, John Whitmer et Peter Whitmer, fils, quatre des huit témoins.

Il y a longtemps que nous savons que les plaques ont également été montrées à Mary Whitmer. Ce sont des récits bien connus qui proviennent de David Whitmer et de John C. Whitmer (fils de John Whitmer). À titre de comparaison, je donne ici deux versions de leurs récits (dans chaque cas, j’ai ajouté une mise en paragraphes).

Récit de David Whitmer, d’après une interview avec Orson Pratt et Joseph F. Smith en septembre 1878, publiée le 16 novembre 1878 dans le Deseret News et reproduite par Dan Vogel dans ses Early Mormon Documents, 5:51-52, Salt Lake City, Utah, 2003 :

Je retournais à Fayette avec Joseph et Oliver, assis sur le chariot, Oliver et moi sur un siège à ressorts en bois à l’ancienne, et Joseph derrière nous, quand, à un moment où nous nous trouvions dans un endroit dégagé, un vieil homme très sympathique, un bel homme, est soudainement apparu sur le côté de notre chariot et nous a salués d’un « bonjour, il fait très chaud » tandis qu’il s’essuyait le visage ou le front avec la main. Nous lui avons rendu son salut et, sur un signe de Joseph, je l’ai invité à monter s’il allait dans la même direction que nous. Mais il a dit très aimablement : « Non, je vais à Cumorah. » Ce nom était plutôt nouveau pour moi, je ne savais pas ce que signifiait Cumorah. Nous l’avons tous regardé et nous nous sommes regardés et, tandis que je me retournais avec un regard interrogateur vers Joseph, le vieil homme a instantanément disparu et je ne l’ai plus revu… C’était le messager qui avait les plaques, qui les avait reprises à Joseph juste avant notre départ de Harmony.

Peu après notre arrivée à la maison, j’ai vu quelque chose qui m’a amené à croire que les plaques étaient placées ou cachées dans la grange de mon père. J’ai franchement demandé à Joseph si ma supposition était juste et il m’a dit que oui. Quelque temps après cela, ma mère est allée traire les vaches et a rencontré dehors, près du potager, le même vieil homme (à en juger par la description qu’elle a faite de lui) qui lui dit : « Tu as été très fidèle et diligente dans ton travail, mais tu es fatiguée à cause de l’augmentation de ton labeur. Il convient donc que tu reçoives un témoignage pour fortifier ta foi. » Alors il lui a montré les plaques. Mon père et ma mère avaient une famille nombreuse à eux et le fait que Joseph, sa femme Emma et Oliver s’y soient ajoutés avait très fortement augmenté le travail et l’anxiété de ma mère. Et même si elle ne s’était jamais plainte, elle avait parfois l’impression qu’elle n’en sortait plus ou du moins elle commençait peut-être à le ressentir. Mais cet événement a complètement balayé tout sentiment de ce genre et lui a donné l’allant pour cet accroissement de responsabilité.

Récit de John C. Whitmer fait en 1878, mis par écrit par Andrew Jenson (voir son Latter-Day Saint Biographical Encyclopedia 1:283, Salt Lake City, Utah, 1901) :

J’ai entendu ma grand-mère (Mary Musselman Whitmer) dire à plusieurs reprises que les plaques du Livre de Mormon lui avaient été montrées par un saint ange, qu’elle appelait toujours frère Néphi. (Elle veut certainement dire Moroni, l’ange qui avait la charge des plaques.)

C’était à l’époque, disait-elle, où la traduction se faisait chez Peter Whitmer, son mari. Joseph Smith avec sa femme et Oliver Cowdery, que David Whitmer avait amenés de Harmony (Pennsylvanie) quelque temps auparavant, logeaient tous chez les Whitmer, et ma grand-mère, qui devait s’occuper de tant de personnes en plus, outre sa grande famille, était souvent à ce point surchargée de travail que c’était pour elle un lourd fardeau.

Un soir, (après avoir fait sa journée de travail habituelle dans la maison), qu’elle se rendait à la grange pour traire les vaches, elle a rencontré un inconnu qui portait sur le dos quelque chose qui ressemblait à un sac à dos. Elle a d’abord eu un peu peur de lui, mais quand il lui a parlé sur un ton gentil et amical et s’est mis à lui expliquer la nature du travail qui se faisait chez elle, elle a été remplie d’une joie et d’une satisfaction indicibles. Il a alors dénoué son sac à dos et lui a montré un paquet de plaques, qui, par la taille et l’apparence correspondait à la description donnée par la suite par les témoins du Livre de Mormon. Cette personne étrange a tourné feuille après feuille, celles du livre de plaques, et lui a aussi montré les inscriptions qui y étaient gravées, après quoi il lui a dit d’être patiente et fidèle à supporter son fardeau encore un peu de temps, promettant que si elle le faisait, elle serait bénie ; et sa récompense serait garantie si elle se montrait fidèle jusqu’au bout. Le personnage disparut ensuite tout d’un coup avec les plaques et elle ne savait pas où il était allé.

À partir de ce moment, ma grand-mère a été capable d’effectuer ses tâches ménagères avec une certaine facilité et elle n’a plus ressenti l’envie de murmurer parce que son sort était dur. Je savais que ma grand-mère était quelqu’un de bon, de noble et d’honnête, et je n'ai pas le moindre doute que sa déclaration d’avoir vu les plaques soit strictement vraie. Elle est restée fermement croyante au Livre de Mormon jusqu’au jour de sa mort.

Voici ce qu’écrit Carl Cox :

Cette même expérience de Maman Whitmer avec les plaques fait partie de mon histoire familiale. Elvira Pamela Mills Cox a entendu l’histoire avant son mariage. Christian Whitmer, l’un des témoins du Livre de Mormon et fils aîné de Peter Whitmer, avait épousé Anna Schott en 1825. Ils ont dû habiter à proximité de chez Peter Whitmer pendant que le Livre de Mormon était en cours de traduction. Quand Christian est décédé en 1835 au comté de Clay, Missouri, Sylvanus Hulet a épousé Anna devenue veuve et a également pris soin de sa nièce orpheline, Elvira Mills. L’expérience de Maman Whitmer devait être connue des membres de la famille et Elvira était une adolescente intéressée à ce moment-là. C’est ainsi que le récit apparaît dans notre histoire de famille :

« Elvira Pamela Mills », Cox Bulletin II (1958), rédigé par Orville Cox Day :

Grand-mère a cessé de raconter une histoire concernant la maman Whitmer jusqu’en 1900 quand B. H. Roberts l’a imprimée dans son « New Witness for God ». Alors elle a dit : « Je suis tellement heureuse de pouvoir de nouveau la raconter ! »

David Whitmer avait invité Joseph et Oliver à vivre chez son père pendant qu’ils traduisaient le Livre de Mormon. Lorsque la main d’Oliver et les yeux de Joseph se lassaient, ils allaient se reposer dans les bois. Là ils faisaient souvent glisser des pierres sur un étang.

Mary Whitmer, qui devait s’occuper de cinq fils adultes et un mari, et des visiteurs en plus, se sentait souvent fatiguée. Elle se disait qu’ils pourraient aussi bien lui porter un seau d’eau ou lui couper un peu de bois que faire glisser des pierres sur un étang.

Elle s’apprêtait à les mettre dehors.

Un matin, juste au lever du jour, elle sortait de l’étable aux vaches avec deux seaux pleins de lait dans les mains quand un homme trapu, costaud, aux cheveux gris, portant un paquet, s’est présenté à elle et lui a dit :

« Je m’appelle Moroni. Tu es fatiguée de tout le travail supplémentaire que tu dois faire. Le Seigneur m’a donné la permission de te montrer ces annales », et il a tourné les feuilles d’or, une par une !

L’aspect le plus intéressant de cette histoire est que le problème que constituait la situation du ménage pour Mary Whitmer était plus que le fait d’être fatiguée de tout le travail supplémentaire. Elle était irritée par l’indifférence de Joseph et d’Oliver vis-à-vis de tout le travail qu’elle faisait, de ce qu’ils ne lui donnaient pas un coup de main plutôt que de lancer des pierres pour se détendre, de sorte que « elle s’apprêtait à les mettre dehors. » L’intervention de Moroni avait donc peut-être plus de raison d’être qu’on pourrait penser. Sans aucun doute, beaucoup d’autres ont fait beaucoup d’efforts pour aider Joseph et Oliver (comme Emma Smith venait de le faire à Harmony (Pennsylvanie) les trois mois précédents). Ici, cependant, Moroni devait faire face à une situation plus difficile, qui aurait pu forcer Joseph à trouver un autre endroit – un endroit sûr – pour faire la traduction. Moroni (et le Seigneur) n’avaient pas pour habitude de montrer les plaques aux gens pour les inciter à agir comme équipe de soutien pour le travail de traduction.

Il y a une indication indépendante de ce qu’au cours du processus de traduction Joseph Smith aimait faire ricocher des pierres dans l’eau pour se détendre. Martin Harris raconte une de ces occasions au printemps de 1828 quand il jouait le rôle de secrétaire pendant que Joseph traduisait le livre de Léhi (les cent seize pages de manuscrit qui furent perdus par la suite). Lors d’un entretien avec Edward Stevenson publié le 30 novembre 1881 dans le Deseret News et réédité les 30 janvier et 6 février 1882 dans le Latter-day Saints Millennial Star, Martin dit (à la page 87 du Millennial Star) que « après un travail de traduction ininterrompu, ils se fatiguaient et descendaient jusqu'à la rivière et se donnaient de l’exercice en jetant des pierres dans l’eau etc. »

Il y a quelques autres différences dans ce récit. Les plaques étaient dans un paquet plutôt que dans un sac à dos. Mary avait déjà fait la traite, et c’était le matin plutôt que le soir. Comme pour tous les récits indépendants d’événements historiques, il y a inévitablement des variantes, des omissions et des ajouts mineurs. Mais la raison de l’intervention de Moroni est clairement une différence importante et probablement exacte.