CHAPITRE 32 : AUTRES ENSEIGNEMENTS AUX APOTRES

 

PROPHÉTIES RELATIVES À LA DESTRUCTION DE JÉRUSALEM ET À L'AVÈNEMENT FUTUR DU SEIGNEUR[1]

 

Au cours de son dernier voyage de retour de Jérusalem à la maison bien-aimée de Béthanie, Jésus se reposa en un endroit favorable du mont des Oliviers d'où l'on pouvait voir la grande ville et le temple magnifique dans le maximum de leur splendeur, illuminés par le soleil déclinant vers la fin de l'après-midi de ce jour mouvementé d'avril. Tandis qu'il était assis, perdu dans sa rêverie, Pierre et Jacques, Jean et André, des Douze, s'approchèrent de lui, et il donna, certainement à eux bien que probablement aussi à tous les apôtres, des enseignements contenant d'autres prophéties relatives à l'avenir de Jérusalem, d'Israël et du monde entier. Sa prédiction prophétique - que des bâtiments du temple il ne resterait pas pierre sur pierre - avait étonné et effrayé les apôtres; ils vinrent donc en privé lui demander des explications. «Dis-nous, dirent-ils, quand cela arrivera et quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde?» Le caractère complexe de la question montre que les apôtres se rendaient compte que la destruction dont le Seigneur avait parlé devait précéder les signes qui devaient annoncer immédiatement son avènement en gloire et l'inauguration encore ultérieure de l'événement final que l'on appelait communément alors comme maintenant «la fin du monde». D'après la manière dont ils formulèrent leur question, les apôtres devaient penser que les événements se suivraient de près.

 

Leur question portait sur le temps: Quand ces choses se produiraient-elles? La réponse ne parlait pas de dates mais d'événements; et l'esprit du discours qui suivit fut un avertissement contre les malentendus et une exhortation à veiller sans cesse. «Prenez garde que personne ne vous séduise», tel fut le premier avertissement capital; en effet dans la vie de la plupart des apôtres, beaucoup d'imposteurs se lèveraient et blasphémeraient, chacun prétendant être le Messie. Le retour du Christ sur la terre comme Seigneur et Juge était plus éloigné qu'aucun des Douze ne le pensait. Avant cet événement extraordinaire, on assisterait à un grand nombre de circonstances étonnantes et effrayantes, les premières d'entre elles devant être des guerres et des bruits de guerre, causés par le fait qu'une nation se dresserait contre l'autre et un royaume contre l'autre, accompagnés en de nombreux endroits de famine, de peste et de tremblements de terre terribles; et cependant tout cela ne serait que le commencement des douleurs qui s'ensuivraient.

 

Il leur fut dit à eux, les apôtres, de s'attendre à être persécutés, non seulement de la part de gens irréfléchis, mais à l'instigation de dirigeants tels que ceux qui s'efforçaient à ce moment-là d'ôter la vie au Seigneur lui-même et qui les flagelleraient dans les synagogues, les livreraient à des tribunaux hostiles, les feraient comparaître devant les gouverneurs et les rois et mettraient même certains d'entre eux à mort: tout cela à cause de leur témoignage du Christ. Comme cela leur avait déjà été promis, ils reçurent de nouveau l'assurance que lorsqu'ils se tiendraient devant les tribunaux, les magistrats ou les rois, les paroles qu'ils prononceraient leur seraient données à l'heure de leur épreuve, et il leur fut dit par conséquent de ne pas réfléchir d'avance à ce qu'ils diraient ni à la manière dont ils répondraient aux problèmes qui se poseraient à eux. «Car, dit le Maître, ce n'est pas vous qui parlerez, mais l'Esprit Saint[2].» Même s'ils se voyaient méprisés et haïs des hommes, et même s'ils devaient subir l'ignominie, la torture et la mort, cependant il leur fut promis tant de sécurité quant à leur bien-être éternel qu'en comparaison ils ne perdraient pas même un cheveu de leur tête. Les consolant et les encourageant, le Seigneur leur ordonna de sauver leur âme par la persévérance[3]. Devant toutes les épreuves et même dans les persécutions les plus cruelles, il leur incombait de persévérer dans leur ministère, car le plan divin prévoyait et exigeait que l'Evangile du royaume fût prêché dans toutes les nations. Leur tâche serait compliquée et concurrencée par la propagande révolutionnaire de beaucoup de faux prophètes, et des différences de croyances diviseraient les familles et engendreraient de telles violences que les frères se trahiraient mutuellement et que des enfants se dresseraient contre leurs parents, les accusant d'hérésie et les livrant à la mort. Même parmi ceux qui avaient professé être disciples du Christ, beaucoup s'offenseraient et la haine abonderait; l'amour de l'Evangile se refroidirait et l'iniquité régnerait parmi les hommes, et seuls ceux qui endureraient jusqu'à la fin pourraient être sauvés.

 

De cette prévision détaillée des conditions qui étaient alors imminentes, le Seigneur passa à d'autres événements qui précéderaient immédiatement la destruction de Jérusalem et le démembrement total de la nation juive. «C'est pourquoi, lorsque vous verrez l'abomination de la désolation dont a parlé le prophète Daniel, établie dans le lieu saint», dit-il, selon le récit de Matthieu, et virtuellement comme le dit Marc, ou «Iorsque vous verrez Jérusalem investie par des armées», comme l'écrit Luc, «sachez alors que sa désolation est proche.» C'était un signe bien clair sur lequel personne ne pouvait se tromper. Daniel le prophète en avait prévu la désolation et l'abomination, parmi lesquelles la cessation forcée des rites du temple et la profanation du sanctuaire d'Israël par des conquérants païens[4].

 

Des armées encercleraient Jérusalem, et cela annoncerait l'accomplissement de la vision prophétique de Daniel. Alors tous ceux qui voudraient s'enfuir devraient se hâter: de Judée ils s'enfuiraient dans les montagnes; celui qui se trouverait sur le toit de sa maison n'aurait pas le temps de prendre ses biens mais devrait descendre rapidement par l'escalier extérieur et fuir; celui qui se trouverait dans les champs ferait mieux de s'en aller sans retourner d'abord chez lui, ne serait-ce que pour aller chercher ses vêtements. Oui, terrible serait ce jour pour les femmes handicapées par l'état qui accompagne une maternité proche ou par la responsabilité de soigner leur nourrisson. Tous feraient bien de prier pour que leur fuite ne leur fût pas imposée en hiver, ni le jour du sabbat, de peur que le respect des restrictions sur les voyages le jour du sabbat ou la fermeture habituelle des portes de la ville ce jour-là ne diminuent les chances de fuite. Les tribulations prédites de ce moment-là se révéleraient être d'une horreur sans précédent, et leurs détails terribles n'auraient aucun parallèle dans l'histoire d'Israël; mais, dans sa miséricorde, Dieu avait décrété que cette terrible période serait écourtée pour l'amour des croyants élus, sinon nulle chair d'Israël ne resterait en vie. Des multitudes tomberaient par l'épée, d'autres foules seraient emmenées captives et seraient ainsi dispersées parmi toutes les nations, et Jérusalem, orgueil de l'Israël dégénéré, serait «foulée aux pieds par les nations, jusqu'à ce que les temps des nations soient accomplis». Comme l'histoire l'a démontré, la prédiction du Seigneur se réalisa dans le moindre de ses terribles détails.

 

Lorsque ces temps terribles seraient passés, et à partir de là pendant une période dont la durée ne fut pas précisée, Satan tromperait le monde par ses fausses doctrines, répandues par des hommes pervers se travestissant en ministres de Dieu, qui continueraient à crier «le Christ est ici, ou: Il est là»; mais les Douze furent mis en garde contre tous ceux-là, et c'est par eux et par d'autres instructeurs, qu'ils appelleraient et qu'ils ordonneraient, que le monde serait averti. Les prophètes trompeurs, émissaires du diable, seraient actifs, certains attirant les gens dans le désert et les poussant à des vies d'ermites d'un ascétisme pernicieux, d'autres affirmeraient avec insistance qu'on pourrait trouver le Christ dans les chambres secrètes de la réclusion monastique, et certains d'entre eux montreraient, par le pouvoir de Satan, des signes et des prodiges de nature à «séduire si possible même les élus», mais le Seigneur avertit les siens contre tous ces plans du prince du mal: «Ne le croyez pas», et ajouta: «Je vous ai tout prédit[5]

 

Lorsque viendra le jour de gloire et de vengeance où le Seigneur reviendra, nul ne pourra en douter; les sectes en conflit n'auront aucune possibilité d'élever des prétentions diverses. «En effet, comme l'éclair part de l'orient et brille jusqu'en occident, ainsi sera l'avènement du Fils de l'homme[6].» Le rassemblement d'Israël dans les derniers jours fut décrit comme l'attroupement des aigles à l'endroit où le corps de l'Eglise serait établi[7].

 

L'ordre chronologique des événements prédits que nous avons examinés jusqu'à maintenant dans ce discours merveilleux sur les choses à venir est clair; tout d'abord il devait y avoir une période de persécutions violentes contre les apôtres de l'Eglise dont ils auraient la charge; puis la destruction de Jérusalem, avec toutes les horreurs d'une guerre impitoyable, suivrait; à cela succéderait une longue période d'intrigues de prêtres et d'apostasie avec de violentes dissensions sectaires et de cruelles persécutions des justes. La brève allusion aux phénomènes non localisés et universels qui signaleront son avènement constitue une dénonciation, donnée entre parenthèses, des fausses prétentions quant au lieu où l'on pourrait trouver le Christ. Ensuite le Seigneur passa à une allusion claire et indubitable aux circonstances de son avènement qui était alors et est maintenant encore à venir. Après l'époque des religions d'hommes et du ministère non autorisé caractéristique de la grande apostasie, des événements merveilleux se produiront par l'intermédiaire des forces de la nature, et le signe du Fils de l'homme apparaîtra finalement, l'un des traits qui doivent l'accompagner étant l'achèvement du rassemblement des élus de toutes les parties de la terre dans les endroits désignés.

 

Le devoir que Jésus avait imposé aux apôtres comme étant de première importance pendant toutes les scènes de douleur, de souffrances et de tourments à venir, fut celui de la vigilance. Ils devaient prier, veiller et travailler diligemment et avec une foi inébranlable. La leçon fut illustrée par une analogie magistrale qui, dans la classification la plus large, peut être appelée parabole. Attirant leur attention sur le figuier et les autres arbres qui poussaient sur les pentes ensoleillées du mont des Oliviers, le Maître dit: «Voyez le figuier et tous les arbres. Dès qu'ils bourgeonnent, vous savez de vous-mêmes, en regardant, que déjà l'été est proche. De même vous aussi, quand vous verrez ces choses arriver, sachez que le royaume de Dieu est proche.» En ce qui concerne particulièrement le figuier, le Seigneur remarqua: «Dès que ses branches deviennent tendres et que les feuilles poussent, vous savez que l'été est proche.» Ce signe d'événements proches s'appliquait aussi bien aux conditions préalables qui devaient annoncer la chute de Jérusalem et la fin de l'autonomie juive qu'aux événements qui précéderont immédiatement le second avènement du Seigneur.

 

La déclaration suivante, dans l'ordre où la présente le texte évangélique, dit: «En vérité, je vous le dis, cette génération ne passera point que tout cela n'arrive.» On peut penser que cela s'appliquerait à la génération dans laquelle les événements terribles déjà décrits se produiraient. Pour ce qui est des prédictions relatives à la destruction de Jérusalem, elles s'accomplirent littéralement du vivant même de plusieurs des apôtres et d'une foule de leurs contemporains; celles des prophéties du Seigneur qui ont trait à l'annonce de sa seconde venue doivent se réaliser au cours de la génération de certains de ceux qui sont témoins du début de leur accomplissement. Soulignant que tout cela se produirait assurément, le Seigneur fit une profonde affirmation: «Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point[8]

 

Le Seigneur prévint toute conjecture concernant l'époque de son apparition, que ce fût sur la base de théories, de déductions ou de calculs de dates, en disant: «Pour ce qui est du jour ou de l'heure, personne ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais le Père (seul)[9]

 

Il montra que son avènement en puissance et en gloire devait être soudain et inattendu pour le monde inattentif et pécheur mais suivrait immédiatement les signes que ceux qui sont vigilants et pieux peuvent lire et comprendre, en faisant la comparaison avec la situation sociale qui régnait à l'époque de Noé, lorsque, en dépit des prophéties et des avertissements, le peuple avait continué à festoyer et à se réjouir, à se marier et à donner en mariage, jusqu'au jour même où Noé entra dans l'arche, «et ils ne se doutèrent de rien, jusqu'à ce que le déluge vienne et les emporte tous; il en sera de même à l'avènement du Fils de l'homme».

 

Dans les derniers stades du rassemblement des élus, les liens de camaraderie seront rapidement rompus; de deux hommes travaillant dans le champ, ou de deux femmes occupées côte à côte aux devoirs ménagers, celui qui est fidèle sera pris et le pécheur sera laissé. «Veillez donc», fut le commandement solennel, «puisque vous ne savez pas quel jour votre Seigneur viendra.» Expliquant cette exhortation, le Seigneur condescendit à comparer la soudaineté et le caractère secret de sa venue aux mouvements d'un voleur au cours de ses exploits nocturnes et fit remarquer que si le maître de maison savait avec certitude quand un cambrioleur avait décidé de lui rendre visite, il veillerait avec vigilance; mais à cause de son incertitude, il peut être surpris au moment où il ne se méfie pas, et le voleur peut entrer et piller la maison.

 

Comparant de nouveau les apôtres à des intendants dûment nommés dans une grande maison[10], le Seigneur parla de lui-même comme s'il était le maître de la maison, disant: «Il en sera comme d'un homme qui part en voyage, laisse sa maison, donne pouvoir à ses serviteurs, à chacun sa tâche, et commande au portier de veiller. Veillez donc, car vous ne savez quand viendra le maître de la maison, le soir, ou au milieu de la nuit, ou au chant du coq, ou le matin; craignez qu'il n'arrive à l'improviste et ne vous trouve endormis. Ce que je vous dis, je le dis à tous: Veillez.» Mais si l'intendant devient négligent à cause de l'absence prolongée de son maître, s'il s'adonne aux fêtes et aux plaisirs débridés ou devient autocrate et injuste vis-à-vis des autres serviteurs, son Seigneur viendra à l'heure où il s'y attend le moins et condamnera ce méchant serviteur à aller dans un lieu où il se trouvera parmi les hypocrites, où il versera des larmes amères de remords et grincera des dents en un désespoir impuissant[11].

 

ILLUSTRATION PAR PARABOLES DE LA NÉCESSITÉ DE LA VIGILANCE ET DE LA DILIGENCE

 

Pour frapper d'une manière plus indélébile les apôtres et, par l'intermédiaire de leur ministère ultérieur, le monde, de la nécessité absolue de veiller sans cesse et de faire preuve d'une diligence inébranlable à se préparer au jour où le Seigneur viendra pour juger, Jésus décrivit en paraboles l'état futur de l'humanité dans les derniers temps. La première de ces descriptions est la parabole des dix vierges. Le seul rapport que nous ayons est celui qui est donné par Matthieu[12] comme suit:

 

«Alors le royaume des cieux sera semblable à dix vierges qui prirent leur lampe pour aller à la rencontre de l'époux. Cinq d'entre elles étaient folles, et cinq sages. Les folles en prenant leurs lampes, ne prirent pas d'huile avec elles; mais les sages prirent, avec leurs lampes, de l'huile dans des vases. Comme l'époux tardait, toutes s'assoupirent et s'endormirent. Au milieu de la nuit, il y eut un cri: Voici l'époux, sortez à sa rencontre! Alors toutes ces vierges se levèrent et préparèrent leurs lampes. Les folles dirent aux sages: Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s'éteignent. Les sages répondirent: Non, il n'y en aurait pas assez pour nous et pour vous; allez plutôt chez ceux qui en vendent et achetez-en pour vous. Pendant qu'elles allaient en acheter, l'époux arriva; celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui au (festin) de noces, et la porte fut fermée. Plus tard, les autres vierges arrivèrent aussi et dirent: Seigneur, Seigneur, ouvre-nous. Mais il répondit: En vérité, je vous le dis, je ne vous connais pas. Veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour, ni l'heure.»

 

L'histoire elle-même est basée sur les coutumes orientales du mariage que les auditeurs attentifs du Seigneur connaissaient bien. Il était et il est encore commun dans ces pays, en particulier lors des festins de noces dans les classes riches, que l'époux se rendit chez l'épouse, accompagné en procession par ses amis, et conduisît plus tard l'épouse à sa nouvelle demeure, suivi d'un groupe plus grand, composé de garçons d'honneur, de dames d'honneur, de parents et d'amis. A mesure que les personnes qui faisaient partie de la fête avançaient, accompagnées d'une musique joyeuse, le cortège s'augmentait de petits groupes qui s'étaient rassemblés pour attendre à des endroits propices le long de la route, et en particulier vers le bout du chemin où des compagnies organisées avançaient à la rencontre de la procession. Les cérémonies de mariage étaient fixées pour la soirée et la nuit, et l'usage nécessaire des torches et des lampes donnait de l'éclat et une beauté supplémentaire à la scène.

 

Dans la parabole, dix vierges attendaient pour accueillir et s'unir aux gens de la noce dont l'heure d'arrivée était incertaine. Chacune avait sa lampe attachée au bout d'un bâton de manière qu'on pût la tenir en l'air lors de la procession, mais des dix vierges cinq avaient sagement emmené une quantité supplémentaire d'huile, tandis que les cinq autres, se disant probablement que le délai ne serait pas grand, ou pensant qu'elles pourraient emprunter aux autres, ou n'ayant peut-être pas réfléchi du tout à la question par négligence, n'avaient d'autre huile que celle dont elles avaient rempli leur lampe au départ. L’époux tarda, et les vierges qui attendaient s'assoupirent et tombèrent endormies. A minuit, l'avant-garde de la procession des noces annonça à grands cris l'approche de l'époux, et s'écria en hâte: «Sortez à sa rencontre!» Les dix vierges, qui ne dormaient plus mais s'empressaient, se mirent au travail pour activer leur lampe; c'est alors que les vierges sages eurent l'occasion d'utiliser l'huile qu'elles avaient dans leurs bouteilles, tandis que les cinq vierges irréfléchies se lamentaient de leur manque d'huile, car leurs lampes étaient vides, et elles n'avaient pas d'huile pour les remplir. Elles firent appel à leurs sœurs plus sages, demandant à partager l'huile; mais celles-ci refusèrent, car donner de leurs réserves à un moment aussi important, ç'aurait été se disqualifier, étant donné qu'il n'y avait assez d'huile que pour leurs propres lampes. Au lieu d'huile, elles ne pouvaient donner que des conseils à leurs malheureuses sœurs, à qui elles recommandèrent d'aller au magasin le plus proche en acheter. Tandis que les vierges folles étaient parties à la recherche d'huile, la noce entra dans la maison où le festin était donné, et on ferma la porte aux retardataires. Plus tard, les vierges folles, arrivant trop tard pour prendre part à l'entrée de la procession, crièrent à l'extérieur, demandant à être reçues; mais l'époux refusa de leur accorder leur demande et nia absolument les connaître, puisqu'elles ne se trouvaient pas parmi sa suite ni celle de l'épouse.

 

L’époux est le Seigneur Jésus; le festin de noces symbolise sa venue en pleine gloire pour recevoir l'Eglise terrestre pour épouse[13]. Les vierges représentent ceux qui professent croire au Christ, et par conséquent, s'attendent avec confiance à être comptés parmi les bienheureux qui participeront au festin. La lampe allumée, que chacune des vierges portait, est la profession extérieure de croyance et de pratique chrétiennes; dans les réserves d'huile des vierges sages, nous pouvons voir la force et l'abondance spirituelles que seules la diligence et la dévotion au service de Dieu peuvent assurer. Le manque d'huile chez les vierges folles est analogue au manque de terre dans le champ pierreux, dans lequel la semence a germé rapidement mais s'est bientôt desséchée[14]. La venue de l'époux fut soudaine; cependant les vierges qui attendaient ne furent pas considérées comme blâmables parce qu'elles avaient été surprises de cette brusque nouvelle, mais les cinq vierges folles subirent les résultats naturels de leur manque de préparation. Il ne faut pas considérer comme un manque de charité le fait que les vierges sages refusèrent de donner de leur huile à un moment aussi critique; cet événement symbolise le fait que le jour du jugement chaque âme devra répondre d'elle-même; il n'est aucun moyen par lequel la justice de l'un puisse être mise au crédit d'un autre; la doctrine de la surérogation est entièrement fausse[15]. Le reniement condamnateur de l'Epoux: «Je ne vous connais pas», équivalait à une déclaration que les vierges implorantes mais négligentes, qui n'étaient pas prêtes, ne le connaissaient pas[16].

 

Le Seigneur résuma d'une manière magistrale l'explication de la parabole et sa richesse de suggestions splendides par cette exhortation impressionnante: «Veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour, ni l'heure.» L’accomplissement des prédictions contenues dans cette précieuse parabole est encore futur, mais proche. En 1831, le Seigneur Jésus-Christ révéla de nouveau les signes par lesquels on pourrait reconnaître l'imminence de son avènement glorieux. Par la bouche de son prophète Joseph Smith, il dit: «Ce jour-là, lorsque je viendrai dans ma gloire, la parabole que j'ai racontée au sujet des dix vierges sera accomplie. Car ceux qui sont sages, ont accepté la vérité, ont pris le Saint-Esprit pour guide et n'ont pas été séduits - en vérité, je vous le dis, ils ne seront pas abattus et jetés au feu, mais supporteront le jour. Et la terre leur sera donnée en héritage; ils multiplieront et se fortifieront, et leurs enfants grandiront sans péché au salut. Car le Seigneur sera au milieu d'eux, sa gloire sera sur eux et il sera leur roi et leur législateur[17]

 

S'adressant toujours avec une ferveur solennelle aux apôtres, tandis que les ombres du soir s'intensifiaient autour du mont des Oliviers, le Seigneur donna la dernière des paraboles qui nous soient rapportées. Nous l'appellerons la parabole des talents[18].

 

«Il en sera comme d'un homme qui en partant pour un voyage appela ses serviteurs, et leur confia ses biens. Il donna cinq talents à l'un, deux à l'autre, et un au troisième, à chacun selon sa capacité et il partit en voyage. Aussitôt celui qui avait reçu les cinq talents s'en alla, les fit valoir et en gagna cinq autres. De même, celui qui avait reçu les deux talents en gagna deux autres. Celui qui n'en avait reçu qu'un alla faire un trou dans la terre et cacha l'argent de son maître. Longtemps après, le maître de ces serviteurs revint et leur fit rendre compte. Celui qui avait reçu les cinq talents s'approcha en apportant cinq autres talents et dit: Seigneur, tu m'avais confié cinq talents; voici cinq autres que j'ai gagnés. Son maître lui dit: Bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, je t'établirai sur beaucoup; entre dans la joie de ton maître. Celui qui avait reçu les deux talents s'approcha aussi et dit: Seigneur, tu m'avais confié deux talents, en voici deux autres que j'ai gagnés. Son maître lui dit: Bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, je t'établirai sur beaucoup; entre dans la joie de ton maître. Celui qui n'avait reçu qu'un talent s'approcha ensuite et dit: Seigneur, je savais que tu es un homme dur, qui moissonnes où tu n'as pas semé, et qui récoltes où tu n'as pas répandu; j'ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre; voici: prends ce qui est à toi. Son maître lui répondit: Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne où je n'ai pas semé, et que je récolte où je n'ai pas répandu; il te fallait donc placer mon argent chez les banquiers, et à mon retour, j'aurais retiré ce qui est à moi avec un intérêt. Otez-lui donc le talent, et donnez-le à celui qui a les dix talents. Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l'abondance, mais à celui qui n'a pas on ôtera même ce qu'il a. Et le serviteur inutile, jetez-le dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents.»

 

Certaines des ressemblances entre cette parabole et celle des mines[19] apparaîtront dès la première lecture; mais en comparant et en étudiant on découvre des différences importantes. La première parabole fut prononcée devant une multitude mêlée au cours du dernier voyage que notre Seigneur fit de Jéricho à Jérusalem; la dernière fut donnée en privé à ses disciples les plus intimes dans les dernières heures du dernier jour de sa prédication publique. Les deux paraboles doivent être étudiées ensemble. Dans l'histoire des mines, un capital égal est donné à chacun des serviteurs, et les capacités diverses des hommes d'utiliser et d'appliquer, avec des résultats proportionnés sous forme de récompense ou de châtiment, y sont démontrées; dans celle des talents, les serviteurs reçoivent des quantités différentes, «à chacun selon sa capacité»; et une diligence égale, quoique se soldant dans un cas par un grand bénéfice et dans l'autre par une augmentation réduite mais proportionnée, est récompensée d'une manière égale. Dans les deux paraboles, ce sont l'infidélité et la négligence qui sont condamnées et punies.

 

Dans la parabole que nous examinons maintenant, nous voyons le maître remettre sa richesse entre les mains de ses serviteurs, littéralement ses esclaves; ils lui appartenaient aussi bien que les biens qui leur étaient confiés. Ces serviteurs n'avaient aucun droit de possession réelle, aucun titre à être en permanence possesseurs du trésor confié à leurs soins; tout ce qu'ils avaient, le temps et l'occasion d'utiliser leurs talents et eux-mêmes, appartenait à leur Seigneur.

 

Nous ne pouvons manquer de voir, dès les premiers incidents de l'histoire, que le maître des serviteurs était le Seigneur Jésus; les serviteurs étaient par conséquent les disciples et plus particulièrement les apôtres qui, bien qu'ils eussent une autorité égale par ordination dans la Sainte Prêtrise, comme l'illustre tout particulièrement la parabole précédente des mines, étaient de capacités diverses, de personnalités différentes et inégaux en général en nature et dans les accomplissements qu'ils seraient appelés à utiliser pendant tout leur ministère. Le Seigneur était sur le point de partir; il ne reviendrait que «longtemps après»; l'importance de ce dernier détail est la même que celle que nous trouvons dans la parabole des dix vierges lorsqu'il y est déclaré que l'époux tardait.

 

Au moment des comptes, les serviteurs qui avaient bien agi, celui avec ses cinq talents, l'autre avec ses deux, firent joyeusement rapport, conscients qu'ils étaient de s'être au moins efforcés de faire de leur mieux. Le serviteur infidèle proféra une excuse grognonne en guise de préambule à son rapport, dans laquelle il accusait le maître d'injustice. Les serviteurs honnêtes, diligents et fidèles voyaient et respectaient dans leur Seigneur la perfection des qualités qu'ils possédaient dans une certaine mesure; le serf paresseux et inutile, affligé d'une vue déformée, professait voir chez le maître ses propres et vils défauts. Dans ce détail, comme dans les autres traits relatifs aux actes et aux tendances humaines, cette histoire est psychologiquement vraie; étrangement, les hommes ont tendance à penser que les attributs de Dieu sont, à un degré accru, les traits dominants de leur propre nature.

 

Le serviteur qui avait reçu cinq talents et celui qui n'en avait reçu que deux furent félicités de la même manière, et, pour autant que nous sachions, furent récompensés de la même manière. Les talents qui avaient été confiés à chacun d'eux étaient le don de son Seigneur, qui savait bien si ce serviteur était capable d'en exploiter au mieux un, deux ou cinq. Que personne n'en tire la conclusion que les bonnes œuvres d'une envergure relativement réduite sont moins nécessaires ou acceptables que les services analogues d'une envergure plus grande. Maint homme qui a bien réussi dans les affaires avec un petit capital aurait échoué s'il avait dû administrer de vastes sommes; il en va de même dans les accomplissements spirituels: «Il y a diversité de dons, mais le même Esprit[20].» On attendait de plus grands bénéfices de la part de l'homme doté de nombreux talents; il n'était requis que relativement peu de l'homme qui n'avait qu'un seul talent, et cependant il échoua dans le peu qu'on lui demandait[21]. Il aurait au moins pu remettre l'argent à la banque, qui l'aurait maintenu en circulation au profit de la communauté et aurait gagné entre-temps des intérêts. De même, dans l'application spirituelle, un homme qui possède un don tel que le talent musical, l'éloquence, l'adresse manuelle ou quelque chose de semblable doit utiliser ce don au maximum, afin que lui et les autres puissent en profiter; mais s'il est trop négligent pour exercer ses capacités dans une activité indépendante, il peut aider les autres à faire un effort profitable, au moins en les encourageant.

 

Qui peut douter, dans l'esprit de l'enseignement du Seigneur, que si l'homme avait pu faire rapport qu'il avait doublé son unique talent, il aurait été aussi cordialement félicité et aussi richement récompensé que ses deux collègues mieux doués et plus fidèles? Il est à remarquer que le Seigneur ne daigne pas réfuter l'accusation d'injustice que le serviteur infidèle porte contre lui; l'esprit de la réponse était le même que celui qui s'exprima dans la parabole antérieure: «Je te jugerai sur tes paroles, mauvais serviteur[22].» L'homme indigne cherchait à s'excuser en employant le subterfuge méprisable mais malheureusement trop commun de rejeter présomptueusement la culpabilité sur un autre et, dans ce cas, cet autre était son Seigneur. Les talents ne sont pas donnés pour être ensevelis, puis pour être déterrés et rendus sans avoir été exploités, exhalant l'odeur de terre et ternis par la rouille de l'inutilité. Le talent non employé fut à juste titre enlevé à l'homme qui l'avait considéré comme de si peu de valeur et fut donné à quelqu'un qui, quoique possédant beaucoup, utiliserait le don supplémentaire à son profit pour l'amélioration de ses semblables et pour la gloire de son Seigneur.

 

LE JUGEMENT INÉVITABLE[23]

 

Le Seigneur avait prononcé sa dernière parabole. En termes simples quoique empreints de la beauté propre aux excellentes comparaisons, il pénétra les disciples qui l'écoutaient de la certitude du jugement qui s'abattra sur le monde le jour de son apparition. Alors le blé sera séparé de l'ivraie[24], et les brebis seront séparées des boucs. «Lorsque le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, avec tous les anges, il s'assiéra sur son trône de gloire. Toutes les nations seront assemblées devant lui. Il séparera les uns d'avec les autres, comme le berger sépare les brebis d'avec les boucs, et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche.» Ceux qui se trouvent à sa droite, le roi les félicitera et les bénira, leur accordant une belle récompense pour leurs bonnes œuvres, manifestées chez les affamés qu'ils ont nourris, les assoiffés à qui ils ont donné à boire, les étrangers qu'ils ont logés, les gens nus qu'ils ont vêtus, les malades qu'ils ont soignés, les prisonniers qu'ils ont visités et encouragés, tous actes de miséricorde qu'il a portés à leur crédit, disant qu'ils les ont faits à leur Seigneur en personne. La multitude bénie, comblée par les bienfaits du roi, dont elle se considère indigne, niera les mérites qui lui sont attribués. «Et le roi leur répondra: En vérité, je vous le dis, dans la mesure où vous avez fait cela à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait.»

 

A ceux qui se trouvent à gauche et attendent, le roi rappellera leurs divers manquements, disant qu'ils ne lui ont donné ni nourriture, ni boisson, ni abri, ni vêtement alors qu'il en avait besoin; qu'ils ne l'ont pas non plus visité bien qu'il fût malade, et qu'ils n'ont pas répondu à ses besoins tandis qu'il se trouvait en prison. Dans leur angoisse désespérée, ceux-ci demanderont quand et où ils ont eu pareilles occasions de le réconforter, et il répondra: «En vérité, je vous le dis, dans la mesure où vous n'avez pas fait cela à l'un de ces plus petits, c'est à moi que vous ne l'avez pas fait.» Les justes seront accueillis par: «Venez, vous qui êtes bénis de mon Père»; les méchants entendront la sentence terrible: «Retirez-vous de moi, maudits.» La vie éternelle est la récompense inestimable; le châtiment éternel, la condamnation insondable[25].

 

En considérant comme un seul discours les deux paraboles et l'enseignement qui les suivit immédiatement, nous y trouvons une unité de sujet et une profondeur d'analyse qui donnent à l'ensemble une beauté et une valeur dépassant la somme des qualités que révèlent les diverses parties. L’histoire des vierges symbolise l'attente vigilante dans la cause du Seigneur et les dangers du manque de préparation; les traits dominants de l'histoire des talents sont la diligence dans le travail et les résultats calamiteux de la paresse. Ces deux aspects du service ont une importance réciproque et complémentaire; il est aussi nécessaire à certains moments d'attendre qu'à d'autres de travailler. Le retard de l'époux et l'absence du maître parti «pour un voyage» montrent clairement qu'une longue période s'écoulera entre le départ du Seigneur et son retour en gloire. Le résumé sublime de ce discours sans pareil est l'absolue certitude que le Christ viendra juger la terre, jugement par lequel chaque âme recevra selon ses mérites.

 

AUTRE PRÉDICTION PRÉCISE DE LA MORT DU SEIGNEUR

 

Après avoir instruit les apôtres à l'endroit où ils se reposaient au mont des Oliviers et probablement pendant la suite du trajet vers Béthanie ce soir-là, Jésus rappela aux Douze le sort terrible qui l'attendait et précisa l'époque où il serait trahi et la manière dont il mourrait. «Vous savez», dit-il, «que la Pâque a lieu dans deux jours, et que le fils de l'homme sera livré pour être crucifié[26]

 

NOTES DU CHAPITRE 32

 

1. Accomplissement rapide des prophéties du Seigneur : Pour ce qui est de l'accomplissement littéral des prédictions du Seigneur relatives aux temps qui suivraient immédiatement son ascension jusqu'à la destruction de Jérusalem, l'étudiant doit se reporter à l'histoire scripturaire et autre. Nous ne pouvons tenter de faire ici qu'un résumé très bref des événements les plus notables.

 

Pour la question des guerres et des bruits ou menaces de guerre, voir Josèphe, Antiquités, XVIII, ch. 9 et Guerres Il, ch. 10. La dernière référence reportera le lecteur au récit du décret promulgué par Caligula, ordonnant que sa statue fût élevée et dûment révérée dans le temple, à la suite de quoi les Juifs protestèrent si violemment que la guerre leur fut déclarée mais n'eut pas lieu du fait de la mort de l'empereur. A propos de la mort de Caligula, Josèphe remarque qu'elle «se produisit fort heureusement pour notre nation en particulier, qui aurait péri presque totalement s'il n'avait été soudainement frappé». Les empereurs Claude et Néron respectivement proférèrent d'autres menaces de guerre contre les Juifs.

 

Les nations se dressèrent contre les nations, par exemple dans l'assaut des Grecs et des Syriens contre les Juifs, au cours duquel 50000 Juifs furent tués à Séleucie sur le Tigre, et 20000 à Césarée, 13000 à Scythopolis et 2500 à Ascalon. La famine, et la peste qui l'accompagne, sévirent pendant le règne de Claude (41-54 ap. J.-C.); Agabus les avait exactement prédites par inspiration (Ac 11:28). La famine fut très violente en Palestine (Josèphe, Antiquités, XX, ch. 2). Les tremblements de terre furent d'une fréquence alarmante et d'une puissance extraordinaire entre la mort du Christ et la destruction de Jérusalem, en particulier en Syrie, en Macédoine et en Achaïe.

 

Voir Tacite, Annales, livres XII et XIV; on trouvera le récit de violentes secousses telluriques à Rome dans Suétone, Vie de Galba. Josèphe (Guerres IV, chapitre 4) rapporte un tremblement de terre particulièrement violent qui bouleversa certaines parties de la Judée et s'accompagna de «secousses et de grondements étonnants de la terre - signes évidents qu'une destruction s'abattait sur les hommes». La menace des «phénomènes terribles et de grands signes dans le ciel» que rapporte Luc, se réalisa dans les événements phénoménaux notés par Josèphe (Préface des Guerres).

 

Le docteur Adam Clarke dit, dans son commentaire sur des passages de Mt 24, à propos des persécutions qui s'abattirent sur les apôtres et d'autres, et sur leur mise en accusation devant les dirigeants: «Nous n'avons pas besoin d'aller plus loin que les Actes des Apôtres pour voir ces détails se réaliser. Les uns, comme Pierre et Jean, furent livrés aux tribunaux (Ac 4:5). Les autres, comme Paul devant Gallion (18:12), devant Félix (chap. 24), devant Festus et Agrippa (ch. 25) furent amenés devant des gouverneurs et des rois. D'autres, comme par exemple Etienne (6:10), et Paul qui fit trembler jusqu'à Félix lui-même (24:25) eurent des paroles et une sagesse auxquelles leurs adversaires furent incapables de résister. D'autres encore, comme Pierre et Jean, furent emprisonnés (4:3). D'autres toujours furent battus, comme Paul et Silas (16:23). D'autres enfin, comme Etienne (7:59) et Jacques, frère de Jean, furent mis à mort. Mais si nous regardons au-delà du livre des Actes des Apôtres, pour voir les persécutions sanglantes qui se produisirent sous Néron, nous verrons ces prédictions encore plus complètement accomplies; outre ces deux champions de la foi, Pierre et Paul, de nombreux chrétiens y périrent. Et ce fut, comme le dit Tertullien, une guerre contre le nom même du Christ; car celui à qui l'on donnait le nom de chrétien avait commis, en portant ce nom, un crime suffisamment grand pour qu'on le mit à mort. Tant étaient vraies les paroles de notre Seigneur lorsqu'il disait qu'ils seraient haïs de tous les hommes à cause de son nom.»

 

Parmi les faux prophètes et les hommes qui se prétendaient ministres dûment accrédités du Christ, il y avait Simon le magicien qui attira beaucoup de gens derrière lui (Ac 8:9, 13, 18-24, voir aussi La Grande apostasie, 7:1,2), Ménandre, Dosithée et Théudas et les faux apôtres dont parle Paul (2 Co 11:13) et d'autres, tels qu'Hyménée et Philète (2 Tm 2:17,18). Le Commentary, de Dummelow, applique ici le récit de Josèphe concernant «un groupe d'hommes méchants, qui trompaient et séduisaient le peuple prétendant avoir l'inspiration divine, qui convainquirent la multitude d'agir comme des fous et marchèrent devant elle dans le désert, prétendant que Dieu lui montrerait là les signes de la victoire». Comparer avec 2 P. 2:1, 1 Jn 2:18, 4:1. Le fait que l'amour d'un grand nombre de personnes se refroidit, tant avant qu'après la destruction de Jérusalem, est attesté par l'apostasie mondiale, laquelle fut le résultat de la corruption de l'Eglise de l'intérieur et des persécutions exercées contre elle de l'extérieur (voir La Grande apostasie, chap. 3-9).

 

La prédication de l'évangile et du royaume «dans le monde entier» n'en fut pas moins réellement une caractéristique essentielle de la période apostolique que ne l'est la dispensation actuelle ou dernière dispensation. L’expansion rapide de l'Evangile et la croissance phénoménale de l'Eglise sous la direction des apôtres d'autrefois est considérée comme l'une des merveilles de l'histoire (La Grande apostasie 1:21, et la citation d'Eusèbe). Paul, écrivant trente ans environ après l'ascension du Christ affirme que l'Evangile avait déjà été porté à toutes les nations et avait «été prêché à toute créature sous le ciel» (Col 1:23, comparer avec verset 6).

 

«L'abomination de la désolation» citée par le Seigneur d'après la prophétie de Daniel s'accomplit littéralement lorsque l'armée romaine mit le siège devant Jérusalem (comparer avec Lc 21:20, 21). Pour les Juifs, les enseignes et les images des Romains étaient une abomination dégoûtante. Josèphe (Guerres VI, chap. 6) dit que les enseignes romaines furent dressées à l'intérieur du temple et que la soldatesque offrit des sacrifices devant elles.

 

L'avertissement donné à tous de fuir Jérusalem et la Judée pour aller dans les montagnes quand les armées commenceraient à entourer la ville fut suivi d'une manière si générale par les membres de l'Eglise que, selon les premiers écrivains de l'Eglise, il ne périt pas un seul chrétien dans ce terrible siège (voir Eusèbe, Hist. Ecclés., livre Ill, chap. 5). Le premier siège mis par Gallus fut levé inopinément. Alors, avant que les armées de Vespasien n'arrivassent aux murs, tous les Juifs qui avaient foi dans l'avertissement que le Christ avait donné aux apôtres et que ceux-ci avaient donné au peuple, s'enfuirent au-delà du Jourdain et s'assemblèrent surtout à Pella (comparer avec Josèphe, Guerres II, ch. 19).

 

Pour ce qui est des horreurs sans précédent du siège qui culminèrent dans la destruction totale de Jérusalem et du temple, voir Josèphe, Guerres VI, ch. 3 et 4. Cet historien estime que le nombre de tués, rien qu'à Jérusalem, s'élevait à 1100000 et dans d'autres villes et les régions rurales un tiers de plus encore. On trouvera des détails dans Josèphe, Guerres II, ch. 18, 20, 1112, 7, 8, 9, IV 1, 2, 7, 8, 9, VII, 6, 9, 11. Des dizaines de milliers de personnes furent emmenées en captivité pour être vendues plus tard comme esclaves ou être massacrées par des bêtes sauvages ou dans les combats de gladiateurs dans l'arène pour l'amusement des spectateurs romains. Au cours du siège, un mur fut édifié autour de la ville tout entière, accomplissant ainsi la prédiction du Seigneur (Lc 19:43): «Tes ennemis t'environneront de palissades.» En septembre de 70 après J.-C., la ville tomba au pouvoir des Romains, et par la suite sa destruction fut si complète que son emplacement fut passé à la charrue. Jérusalem fut «foulée aux pieds par les nations», et dès lors s'est trouvée sous la domination des nations et continuera à l'être «jusqu'à ce que les temps des nations soient accomplis» (Lc 21:24).

 

2. Dans le désert et les chambres secrètes : Le 24e chapitre de Matthieu et les écritures parallèles de Marc 13 et Luc 21 sont plus faciles à comprendre si nous nous rappelons que le Seigneur y parle de deux événements distincts, chacun étant la fin de longues périodes de préparation et le premier d'un prototype du deuxième. Beaucoup de prédictions précises s'appliquent à la fois à l'époque précédant la destruction de Jérusalem et les événements des temps qui s'ensuivront jusqu'à la seconde venue du Christ, ou contemporaine de ces faits. Le passage de Mt 24:26 peut recevoir cette double application. Josèphe parle d'hommes emmenant d'autres personnes dans le désert, disant en vertu d'une prétendue inspiration qu'elles y trouveraient Dieu; et le même historien parle d'un faux prophète qui en conduisit beaucoup dans les chambres secrètes du temple au cours de l'assaut romain, leur promettant que le Seigneur les y délivrerait. Hommes, femmes et enfants suivirent ce chef fanatique et furent pris dans l'holocauste, de sorte que 6000 d'entre eux périrent dans les flammes (Josèphe, Guerres XI, ch. 5). Concernant une application des préceptes du Seigneur à des temps et des situations ultérieurs, l'auteur a écrit ailleurs (La Grande apostasie, 7:22, 25): «L'une des hérésies du début et qui se développa rapidement dans l'Eglise fut la doctrine de l'antagonisme entre le corps et l'esprit selon laquelle le premier était considéré comme un fardeau et comme une malédiction. D'après ce que l'on a dit, on reconnaîtra en cela une des perversions dérivées de l'alliance du gnosticisme avec le christianisme. Un des résultats de cette greffe des doctrines païennes fut une croissance abondante de vie anachorétique par laquelle les hommes cherchaient à affaiblir, torturer et subordonner leur corps, pour que leur esprit ou «âme», puisse acquérir plus de liberté. Beaucoup de ceux qui adoptèrent cette vision artificielle de l'existence humaine se retirèrent dans le désert pour être seuls et passèrent leur temps à d'austères pratiques d'abnégation et à des actes de torture personnelle frénétique. D'autres s'enfermèrent comme prisonniers volontaires, cherchant la gloire dans la privation et dans la pénitence qu'ils s'imposaient à eux-mêmes. Ce fut cette vision artificielle de la vie qui donna naissance aux différents ordres de reclus, d'ermites et de moines.

 

Ne pensez-vous pas que le Christ ait eu ces pratiques à l'esprit quand, avertissant les disciples des fausses prétentions à la sainteté qui caractériseraient les temps qui devaient bientôt suivre, il dit: «Si donc on vous dit: Voici: il est dans le désert, n'y allez pas; voici: il est dans les chambres, ne le croyez pas»?

 

3. L’époque de l'avènement du Christ est inconnue : Lorsque le Seigneur dit que l'époque de son avènement était inconnue de l'homme, et que les anges ne la connaissaient pas, «ni le Fils», mais qu'elle n'est connue que du Père, il parlait clairement et sans ambiguïté, en dépit des commentaires, nombreux et contradictoires qui ont été faits sur ces paroles. Jésus affirma à de nombreuses reprises que sa mission était de faire la volonté du Père; et il est évident que la volonté du Père lui fut révélée de temps en temps. Tandis qu'il se trouvait dans la chair, il ne prétendit pas à l'omniscience. Bien qu'il pût apprendre tout ce qu'il voulait en communiquant avec le père, Jésus n'avait pas demandé à savoir ce que le Père ne s'était pas déclaré prêt à révéler, à savoir le jour et l'heure fixés pour le retour sur la terre du Fils glorifié et ressuscité. Nous ne devons pas hésiter à croire qu'à l'époque où Jésus fit aux apôtres le discours que nous examinons ici, il n'était pas au courant de la question, car il le dit. Dans le dernier entretien entre le Christ et les apôtres, immédiatement avant son ascension (Ac 1:6,7) ils demandèrent: «Seigneur, est-ce en ce temps que tu rétabliras le royaume pour Israël? Il leur répondit: Ce n'est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité.» Et depuis, la date de la fin messianique n'a été révélée à personne; bien que d'ores et déjà le figuier pousse rapidement ses feuilles, et celui qui a des yeux pour voir et un cœur pour comprendre sait que l'été du dessein du Seigneur est proche.

 

4. La doctrine erronée de la surérogation : Parmi les erreurs pernicieuses promulguées comme dogmes autorisés par l'Eglise apostate au cours de la longue période de ténèbres spirituelles qui suivit la fin du ministère apostolique, il faut compter la terrible énormité que l'on appelle la doctrine de la surérogation. Comme le dit Mosheim (Ecc. Hist. Cent. XII, 2e partie, ch. 3:4), cette horrible doctrine fut formulée comme suit au treizième siècle: «Qu'il existait réellement un immense trésor de mérites, composé des actes pieux et des actions vertueuses que les saints avaient accomplis au-delà de ce qui était nécessaire pour leur propre salut, et qui était par conséquent disponible au profit des autres; que le gardien et le dispensateur de ce trésor précieux était le pontife romain et que, par voie de conséquence, il avait le pouvoir d'accorder à ceux qu'il voulait, une partie de cette source inépuisable de mérites, selon leur culpabilité respective et en quantité suffisante pour les délivrer du châtiment dû à leurs crimes.» Concernant la fausseté de cette doctrine, l'auteur a écrit (La Grande apostasie, 9:15) ce qui suit: «La doctrine de la surérogation manque tout autant de raison que de base [scripturaire] et de véracité. La responsabilité individuelle de l'homme pour ses actes est tout aussi sûrement un fait que son libre arbitre d'agir, pour lui-même. Il sera sauvé par les mérites et par le sacrifice expiatoire de notre Rédempteur et Sauveur; et son appel au salut fourni dépend strictement de sa soumission aux principes et ordonnances de l'évangile tel que Jésus-Christ l'a établi. La rémission des péchés et le salut [final] de l'âme humaine sont donnés; mais ces dons de Dieu ne peuvent s'acheter avec de l'argent. Comparer avec les terribles fausses idées de la surérogation et la pratique blasphématoire de prendre sur soi de remettre les péchés d'un homme sur la base des mérites d'un autre avec la déclaration du seul et unique Sauveur de l'humanité: «je vous le dis: au jour du jugement, les hommes rendront compte de toute parole vaine qu'ils auront proférée.» Si l'on peut tirer des conclusions en matière de doctrine des paraboles de notre Seigneur, la parabole des dix vierges réfute la suggestion satanique que le péché d'un homme peut être neutralisé par la droiture d'un autre. Nous ne connaissons d'autre surérogation que celle du Seigneur Jésus-Christ, par les mérites duquel le salut est mis à la portée de tous les hommes.

 

5. «Cette génération» : Consultez n'importe quel bon dictionnaire non abrégé de la langue anglaise, vous y trouverez la preuve que le terme «génération» dans le sens d'une période de temps, a beaucoup de sens, parmi lesquels on trouve «race, espèce, classe». Le terme ne se limite pas à un groupe de gens vivant à un moment donné. La Bible Cyclopedia, Critical and Expository, de Fausett, après avoir cité un grand nombre de sens qui se rattachent au mot, dit: «Dans Mt 24:34 ‘Cette génération ne passera point (à savoir la race juive, dont la génération à l'époque du Christ était un échantillon: comparez le discours du Christ à la «génération» 23:35, 36 prouvant que «génération» signifie parfois la race juive tout entière) que tout cela n'arrive’ - prophétie annonçant que les Juifs constitueront encore un peuple distinct lorsque le Seigneur reviendra.»

 



[1] Mt 24:3-51, Mc 13:3-37, Lc 21:5-36, cf. PGP, Joseph Smith 1.

[2] Mc 13:11; cf. Mt 10:19, 20, Lc 12:11, 12, 21:14, 15.

[3] Lc 21:19; cf. D&A 101:38.

[4] Dn 9:27.

[5] Note 1, fin du chapitre. Note 2, fin du chapitre.

[6] Mt 24:27; cf. Lc 17:22-24.

[7] On trouvera une application de l'image des aigles se rassemblant autour d'un cadavre au rassemblement d'Israël dispersé, dans PGP, Joseph Smith, Mt 27, où nous lisons: «De la même façon, mes élus seront rassemblés des quatre coins de la terre.» Chez les spécialistes de la Bible, l'interprétation favorite du passage «Où que soit le cadavre là s'assembleront les aigles», c'est que le Christ comparait à des aigles (édition révisée anglaise «vautours») les anges qui viendront avec lui passer jugement sur l'humanité, et à un cadavre, la corruption du péché. Voir Mt 24:28; cf. Lc 17:37.

[8] Mt 24:35; cf. 5:18, Mc 13:31, Le 21:33; cf. 16:17; voir aussi Hé 1:10, 11, 2 P 3:7-10, Ap 21:1. Note 5, fin du chapitre.

[9] Voir note 3, fin du chapitre.

[10] Page 479.

[11] Mt 24:45-51, Mc 13:34-37, Lc 21:34-36; cf. 12:35-48.

[12] Mt 25:1-13.

[13] Cf. Ap 21:2, 9, 22:17; voir aussi Mt 9:15, Jn 3:29.

[14] Voir parabole du semeur, Mt 13:5, 6, 20, 21; page 309 supra.

[15] Note 4, fin du chapitre.

[16] Cf. Jn 10:14.

[17] D&A 45:56-59; voir aussi 63:53, 54.

[18] Mt 25:14-30.

[19] Lc 19:12-27; voir aussi page 550 supra.

[20] 1 Co 12:4; étudier tout le chapitre.

[21] Lc 12:48.

[22] Lc 19:22; cf. Mt 12:37.

[23] Mt 25:31-46.

[24] Mt 13:24-30; page 313 supra.

[25] Page 314.

[26] Mt 26:2.

 

 

 

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