Réflexions sur la peine de mort

Par idumea

La position de l'Église sur la peine de mort est-elle compatible avec la Déclaration des droits de l'homme ?

La croyance en un Dieu d'amour, de vie et de création, est-elle compatible avec la peine de mort ?

1. Généralités

Dans l'Ancien Testament, Dieu exige la peine capitale pour celui qui a commis un meurtre. Dieu dit à Noé : « Si quelqu'un verse le sang de l'homme, par l'homme son sang sera versé; car l'homme ne versera pas le sang de l'homme » (TJS, Gn 9:12) et il dit à Moïse : « Celui qui frappera mortellement un être humain sera puni de mort. » (Lév. 24:17).

Il est donc clair que lorsque l'autorité civile et religieuse est représentée, comme c'était le cas à l'époque de l'Ancien Testament, par une seule personne, et que cette personne est un Prophète de Dieu, celui-ci demande la peine capitale pour le meurtrier.

Aujourd'hui, la situation est différente. L'autorité civile (l'État) et l'autorité religieuse (l'Église du Christ) sont séparées et le droit de vie ou de mort (peine de mort, avortement, euthanasie, déclaration de guerre...) est strictement réservé à l'État (pouvoir législatif et judiciaire).

De par cette situation, l'Église, dans les derniers jours, ne s'oppose pas à la peine capitale, mais elle ne demande pas non plus aux gouvernements de l'appliquer. Dans une même révélation (D&A 42), donnée au Prophète Joseph Smith, le Seigneur nous dit au verset 19 : « Tu ne tueras pas; mais celui qui tue mourra », puis Il ajoute au verset 79 : « ...si quelqu'un parmi vous tue, il sera livré et traité selon les lois du pays », laissant ainsi à l'État le soin de prendre ses responsabilités dans les domaines législatif et judiciaire, et demandant aux saints d'obéir aux lois de leur pays (12ème article de foi).

Dans une déclaration officielle datée du 12 décembre 1889, en réponse à des rumeurs lancées par les ennemis de l'Église, selon lesquelles celle-ci enseignait à ses membres qu'ils n'étaient pas soumis aux lois des États-Unis et qu'ils pouvaient tuer toute personne qui n'acceptait pas la doctrine de l'Eglise ou n'y obéissait pas, la Première Présidence et le Conseil des Douze Apôtres ont écrit : « ...l'Église considère avec la plus grande aversion toute effusion de sang humain... »

D'autres déclarations d'Autorités générales complètent la vision de l'Église sur le sujet. Orson F. Whitney a dit au cours de la conférence générale d'octobre 1910 : « ...ce n'est pas un meurtre que d'exécuter un criminel... » et Bruce R. McConkie a écrit : « ...à l'exception de la peine de mort demandée pour un meurtre, l'homme n'est pas autorisé à faire couler le sang d'un autre, et ce, quelles que soient les circonstances... » (McConkie, p. 257).

Ainsi, l'Église considère la peine capitale comme une peine appropriée au meurtre. Cependant, cette peine n'est acceptable que si le meurtrier est, sans le moindre doute, reconnu coupable, au cours d'un jugement public et légal, sous la responsabilité d'officiers civils reconnus par la Constitution.

2. Historique rapide

La première « peine de mort » fut prononcée par Dieu lui-même envers un homme. C'était dans le jardin d'Eden, lorsque Adam et Ève transgressèrent, en prenant du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal (« car le jour où tu en mangeras, tu mourras... » Gn 2:17). Cette peine de mort n'est toutefois pas choquante (du moins pour nous... peut-être l'était-elle plus pour Adam !) :

1. Parce qu'elle ne fut pas exécutée de suite (Dieu laissa à Adam et Ève 1 jour, c'est-à-dire 1000 ans, pour se préparer à mourir),

2. Parce que cela faisait partie du plan de Dieu (recevoir un corps pour progresser, puis mourir pour ressusciter) et

3. Parce que, grâce à cette transgression, nous avons pu, nous aussi, profiter du plan de salut (si Adam et Ève n'avaient pas transgressé, nous serions toujours en train d'attendre notre tour pour venir sur terre).

La deuxième série de « peines de mort » fut également prononcée par Dieu envers les hommes, par l'intermédiaire d'un prophète. Ce fut la loi mosaïque :

- Toute personne qui ne respectera pas le jour de sabbat sera mise à mort (Ex. 31:12-17).

- Toute personne qui utilisera la divination ou la sorcellerie sera mise à mort (Lév. 20:6, 27; Ex. 22:18).

- Toute personne qui commettra l'inceste, la fornication, l'adultère, l'homosexualité sera mise à mort (Lév. 20:10).

- Toute personne qui adorera un faux dieu sera mise à mort (Deut. 13:6-11).

- Toute personne qui versera le sang innocent sera mise à mort (Gn. 9:6; Ex. 21:12; Lév. 24:17; D&C 42:19).

Ceci semble horriblement sévère, mais il faut toutefois garder à l'esprit que le Seigneur prenait une nation d'esclaves pour les transformer en un peuple de rois et de prêtres. Pour y arriver, une obéissance stricte à ses lois divines devait être observée. Le processus devait également se faire très rapidement, afin que, libéré des Égyptiens, Israël ne se fasse pas absorber par d'autres peuples idolâtres.

La troisième sorte de peine de mort a été prononcée, cette fois-ci, par un homme à l'encontre d'un Dieu ! Ou du moins c'est ce que beaucoup pensent que Ponce Pilate a fait. La vérité, c'est que personne n'a et n'aurait été capable de mettre à mort le Fils de Dieu. C'est littéralement Jésus-Christ qui s'est sacrifié en donnant sa vie. Une « peine de mort » auto-prononcée par quelqu'un dont l'amour était tel qu'il était prêt à payer pour les fautes des autres, afin de satisfaire les exigences de la justice.

La quatrième catégorie a été prononcée par des hommes envers d'autres hommes. C'est l'utilisation de la deuxième catégorie, non pas pour obéir à Dieu, ni pour réaliser ses desseins, mais pour assouvir leurs propres fantasmes de pouvoir, de gloire et de richesse. Un système largement utilisé au moyen-âge (cf. la « sainte » inquisition) et toujours d'application aujourd'hui dans certains pays. Il est nécessaire de souligner que ce type de jugement, condamnant à mort des personnes pour des raisons pseudo-religieuses, est une pratique totalement apostate et injustifiable. Il y a gros à parier que toutes les personnes qui ont été et qui sont jugées de la sorte n'ont jamais eu de rapport, que ce soit de près ou de loin, avec la sorcellerie, les esprits qui servent Satan et autres accusations. Cet exemple illustre de manière parfaite comment des principes appartenant à la vraie religion peuvent être détournés par des hommes non inspirés, pour finalement servir le plan du malin.

La cinquième série est celle qui concerne notre époque. L'État et l'Église sont séparés. Certains États appliquent encore la peine de mort, sans que le sang soit littéralement versé pour autant, comme le demandent les Écritures. C'est l'injection, la chaise électrique, etc. D'autres, au nom des Droits de l'homme, montrent du doigt les premiers et déclarent, eux, ne pas donner la mort. Ils ont trouvé un meilleur système : ils enferment un être humain dans une « cage » et attendent que celui-ci, avec le temps, meure de façon « naturelle ». Une preuve flagrante que la vision de l'homme est très limitée, et que, par conséquent, les solutions qu'il trouve le sont également.

3. La doctrine

Pour comprendre (et donc accepter) la nécessité de la peine de mort, il faut comprendre trois points majeurs de la doctrine :

3.1. Le Plan de Salut

3.2. Le repentir

3.3. La définition du meurtre par l'Église

3.1. Le Plan de Salut

Rappel :

Dans le plan de Dieu, communément appelé le Plan de Salut, l'homme, qui vivait en la présence du Père, accepte de venir sur terre pour progresser afin de ressembler plus à Dieu. Pour ce faire, il doit recevoir un corps mortel (étape indispensable pour recevoir ensuite un corps ressuscité) et doit progresser (ce qui se passe lorsqu'il choisit le bien plutôt que le mal). Deux obstacles l'empêchent toutefois de rentrer, après cette vie terrestre, en la présence du Père : la mort physique (parce que redevenu esprit, il ressemble plus physiquement à Satan qu'à Dieu) et le péché (parce que rien d'impur ne peut entrer en la présence de Dieu). Conscient de ces deux obstacles, Jéhovah, le Premier-né en esprit du Père, propose de se sacrifier. Il deviendra sur terre le Fils unique du Père. Dieu par son Père, il sera capable de prendre sur lui les péchés du monde afin que toute personne qui se repent puisse être purifiée, homme par sa mère, il pourra comprendre nos souffrances et nos faiblesses. Par sa nature humaine, il pourra mourir sur la croix, par son pouvoir Divin, il sera capable de reprendre sa vie et d'ouvrir à tous les hommes les portes de la résurrection.

Après être passé sur cette terre, bons et méchants se retrouvent dans un endroit appelé le monde des esprits, les uns attendant avec joie l'étape suivante, continuant à vivre une vie digne d'un disciple du Christ, prêchant son Évangile à quiconque veut l'entendre, les autres dans la peur provoquée soit par l'ignorance et donc l'incompréhension du plan de Dieu, soit par la souffrance causée par les péchés pour lesquels aucun repentir n'avait été exprimé sur terre.

Vient ensuite le jour de la résurrection, puis celui du jugement. Alors, suivant leurs œuvres, les justes hériteront la gloire céleste (présence du Père, du Fils et du Saint-Esprit), les tièdes hériteront la gloire terrestre (présence du Fils et du Saint-Esprit) et les méchants, la gloire téleste (présence seulement du Saint-Esprit).

Chacune de ces gloires, y compris la gloire téleste, surpasse de loin le bonheur et la beauté que nous pouvons connaître sur cette terre. Chaque personne qui héritera une de ces trois gloires sera donc « sauvée », même si seule la gloire céleste apporte le bonheur éternel, par la présence constante de la Divinité et par la possibilité d'une progression éternelle.

3.2. Le repentir

« Les premiers principes et ordonnances de l'Évangile sont : la foi au Seigneur Jésus-Christ, le repentir, le baptême par immersion pour la rémission des péchés et le don du Saint-Esprit par l'imposition des mains » (4ème article de foi). Voilà les premiers pas à faire en direction de notre Sauveur Jésus-Christ. Toutefois, si le baptême nous lave parfaitement de tous nos péchés, la chair est faible et l'homme rechute aussitôt. Pour que nous restions purs et prêts à rencontrer notre Créateur à tout moment, Dieu a mis à notre disposition un moyen qui nous permet d'utiliser le sang expiatoire du Christ (qui a été donné pour tous les péchés, sauf pour celui de verser volontairement et consciemment le sang innocent [James R. Clark, Messages of the First Presidency, Vol.3, pp. 205-206]), afin de nous laver au fur et à mesure de nos souillures : ce moyen s'appelle le repentir.

Étapes du repentir :

1. Se rendre compte que ce qu'on a fait est mal

2. Éprouver de la honte et du chagrin

3. Demander pardon à Dieu

4. Demander pardon à la personne lésée, blessée ou offensée

5. Réparer

6. Ne plus recommencer

3.3. La définition du meurtre par l'Église

L'Église appelle meurtre le fait de prendre de manière injustifiée et délibérée, la vie d'un être humain. Si la mort est entraînée par un manque d'attention ou de soins, par la défense de sa propre vie ou de celle des autres, ou si d'autres circonstances atténuantes dominent la situation (telle que la déficience mentale ou l'état de guerre) l'acte peut être considéré comme autre chose qu'un meurtre. En dernière instance, ce sera de toutes façons Dieu qui jugera.

4. Le problème du meurtrier

Contrairement aux apparences, le meurtrier est en fait plus mal loti que la personne qu'il a assassinée pour les raisons suivantes :

En admettant qu'il se rende compte de l'horreur de son péché et qu'il veuille réellement s'en repentir (exemple David), il ne peut, même s'il le désire, en réaliser toutes les étapes. Il peut éprouver de la honte et du chagrin, il peut demander pardon à Dieu, il peut ne plus jamais recommencer, mais il ne pourra jamais réparer (c'est-à-dire ramener la personne à la vie), ni demander pardon à sa victime (dans cette vie) pour avoir mis fin, prématurément à sa progression.

Alors que le Christ à versé son sang pour tous les autres péchés, il a retenu son expiation pour un seul : le meurtre. La personne qui commet un tel péché devra donc (et le meurtre est le seul cas de figure), en plus du repentir nécessaire (voir point précédent) payer lui-même le prix par sa propre souffrance, sans aucune aide du Christ (pour une description de ces souffrances, voir D&A 19:15-19).

5. La « solution » du meurtrier

Le mot solution est un bien grand mot lorsqu'on se trouve dans la peau d'un meurtrier, car quoi qu'il fasse, il ne pourra jamais plus ressentir le Saint-Esprit sur cette terre et ne pourra hériter en aucun cas le royaume céleste dans le monde à venir (Bruce R. McConkie, Mormon Doctrine, p. 737). La seule chose qu'il puisse faire c'est donc de « limiter la casse » (les écritures ne disent pas qu'il est impossible pour lui d'hériter le royaume terrestre) et de limiter au maximum sa souffrance dans le monde des esprits. Comment ?

- En montrant que son repentir est si sincère que s'il ne peut permettre à la personne qu'il a assassinée de continuer sa progression, il refuse lui aussi la sienne.

- En montrant que puisqu'il ne peut lui demander pardon dans cette vie, il va le faire aussi vite que possible dans la suivante.

- En montrant que s'il ne peut réparer en lui rendant la vie, il regrette au point de vouloir donner la sienne.

Vue sous cet angle, la peine de mort n'est donc pas infligée par une tiers personne : elle est choisie par la personne concernée.

Il est important de faire également remarquer que comparativement à notre progression en tant qu'esprits, notre progression sur terre, grâce à notre corps, est plus rapide et plus puissante. Il est donc logique de penser que quelqu'un qui chercherait à éviter de payer pour ce type de péché sur terre, devrait le faire dans le monde des esprits, mais à son désavantage, car, n'ayant plus de corps, sa souffrance serait à fortiori plus longue et plus pénible.

6. Conclusion

La vision de Dieu ne peut être comparée à celle des hommes.

Parce que l'homme pense qu'il n'y a rien après la mort, il protège la vie jusqu'à l'absurde. Dieu dit que cette vie est sacrée, mais qu'elle n'est qu'une étape dans son plan divin.

L'homme dit que même pour un meurtrier, la peine de mort est la fin de la vie. Dieu dit que c'est le début du repentir.

Oui, dans un système théocratique parfait, la peine de mort a sa place. Toutefois, étant donné que notre environnement a depuis longtemps coupé les ponts avec Dieu, et avec la révélation, nous soutenons le système actuel pour éviter erreurs et dérives.

Il n'est pas regrettable que la peine de mort ait été abolie dans nos pays. Il est seulement regrettable qu'un meurtrier qui a compris tout ceci, ne puisse avoir accès, s'il le désire et le demande, à la possibilité de donner sa vie en gage de son repentir sincère.

7. Quelques sujets de réflexion

La peine de mort est en fait un principe qui n'existe pas pour ceux qui aiment la vie, elle n'existe que pour ceux qui aiment la mort.

Quelle mort est la plus à craindre ? La mort physique ou la mort spirituelle, c'est-à-dire être privé de la présence de Dieu ?

Aussi horrible que puisse être la mort physique, aussi merveilleuse est la résurrection, aussi horrible que puisse être la mort spirituelle momentanée (le péché), aussi merveilleux sont le sacrifice expiatoire et la vie éternelle.

Si l'adultère, la fornication et l'homosexualité étaient punis à l'époque du Christ par la peine de mort, et ne le sont plus aujourd'hui, cela rend-il pour autant ces péchés moins graves ?

Peut-on ne croire dans la Bible que ce qui nous arrange ? L'Évangile du Christ est-il un Évangile à la carte ?

8. Références :

Benson, Ezra Taft. Teachings of Ezra Taft Benson. Salt Lake City, 1988.

Bruce R. McConkie, Mormon Doctrine, p.407

Encyclopedia of Mormonism, Vol.1, capital punishment

Encyclopedia of Mormonism, Vol.2, murder

Martin R. Gardiner, Mormonism and Capital Punishment: A Doctrinal Perspective, Past and Present Dialogue 12 (Spring 1979), pp. 9-25.

James R. Clark, Messages of the First Presidency, Vol.3, p.205

John Taylor, The Gospel Kingdom, p.118

Joseph F. Smith, Gospel Doctrine, p.202

Joseph Fielding Smith Jr., Doctrines of Salvation, Vol.2, p.96

Joseph Fielding Smith Jr., The Way to Perfection, p.236

Kimball, Spencer W. The Miracle of Forgiveness. Salt Lake City, 1969.

Kimball, Spencer W. Teachings of Spencer W. Kimball, ed. Edward L. Kimball. Salt Lake City, 1982.